L’archipel des îles Chatham abrite une espèce connue pour être l’un des plus beaux exemples de réussite de programme de conservation. Le miro des Chatham était en 1980 l’espèce d’oiseau comptant la plus petite population au monde. De nos jours, bien que toujours en danger, Petroica traversi va mieux et on vous explique pourquoi.
Les îles Chatham sont parfaitement inconnues en France. Ces huit îles sont situées à 800 kilomètres de la Nouvelle-Zélande et connaissent des soucis équivalents concernant leur biodiversité endémique. Comme le kakapo, le miro des Chatham, Petroica traversi, a été victime des espèces invasives amenées par l’Homme au début du XXème siècle et particulièrement des rats et des chats, friands respectivement des œufs et des oiseaux adultes. Leur introduction sur l’archipel a provoqué le déclin foudroyant de l’espèce. En 1972, seuls 18 miros des Chatham sont retrouvés sur l’île Petite Mangere et ce chiffre baisse encore cinq ans plus tard pour atteindre sept individus seulement. Devant la déforestation qui sévit sur le territoire de l’oiseau, le service de faune sauvage de Nouvelle-Zélande décide de transférer les survivants sur l’île Mangere, qui ne mesure qu’un peu plus d’1 km², où 120 000 arbres sont plantés afin de recréer le couvert forestier qu’affectionne l’espèce.
En 1980, après la mort de deux autres spécimens, les autorités mettent en place un programme de conservation et de gestion drastique pour sauver l’espèce qui semble vouer à l’extinction. Cinq individus perdurent alors, deux mâles et trois femelles, mais un seul couple reproducteur, ce qui n’arrange guère les affaires de nos ornithologues. Old Blue et Old Yellow, notre couple prodigue, deviennent alors les oiseaux les plus précieux au monde. Afin de booster leur productivité, les scientifiques emploient un procédé peu commun : à chaque fois que notre duo se reproduit et que la femelle pond ses oeufs, en général au nombre de deux, ils lui sont retirés et placés dans le nid d’une femelle miro mésange, Petroica macrocephala chathamensis, une espèce cousine. Le but ? Obliger Old Blue et Old Yellow à remplacer la portée rapidement en se reproduisant à nouveau. Le petit stratagème a semble-t-il assez bien fonctionné puisque de cinq oiseaux en 1980, l’espèce passe à 12 puis 93 puis 142 et ainsi de suite jusqu’à environ 250 au début de l’année 2013 et plus de 300 en 2015.
La méthode de « ponte intensive » n’a toutefois été employée que de 1980 à 1989, l’espèce s’étant par la suite reproduite naturellement, à un rythme, en toute logique, plus lent. Bien que peu naturel, ce stratagème reste encore aujourd’hui reconnu comme un véritable succès puisque qu’il a peut-être permis à Petroica traversi d’éviter l’extinction. Mais « peut-être » seulement. L’espèce est toujours placée dans la catégorie « en danger d’extinction » sur la liste rouge de l’UICN compte tenu de ses faibles effectifs et des menaces qu’elle encourt toujours. Parmi elles, la maladie est l’une des plus grandes craintes des ornithologues. L’ensemble de la population d’oiseaux actuelle descend d’un seul et même couple et possède donc une diversité génétique très faible. Une consanguinité qui engendre une sensibilité commune aux mêmes bactéries. Un seul virus pourrait donc décimer l’espèce toute entière. Autre menace, la prolifération des étourneaux sansonnets et des merles qui s’attaquent aux juvéniles miros des Chatham. Le changement climatique semble également peser sur l’espèce qui fréquente les forêts avec une importante canopée, la couverture végétale formée par les cimes des arbres, et des sous-bois denses.
Malgré ces nouvelles menaces, le miro des Chatham reste un des beaux exemples de réussite de plan de protection et le procédé, peu conventionnel, employé par les scientifiques pour sauver l’espèce, un modèle à réitérer.
0 réponse à “Miro des Chatham : découvrez l’étonnant procédé qui a sauvé l’espèce”