Sujet épineux entre tous, on en sait davantage sur le futur Plan loup de l’Etat français, le premier sous l’ère Hulot ! Les ministères concernés ont présenté hier une version quasi-définitive du plan d’action 2018-2023, qui tranche avec les anciennes.
Dans la famille polémique française, le loup trône en bonne place ! Son statut d’espèce menacée et donc protégée, le quota abattage et ses dérogations, son expansion dans de plus en plus de départements français sont autant de points d’anicroches entre les éleveurs et les associations de protection animale. Et l’Etat dans tout ça ? Il a la lourde tâche de trouver un statu quo en rédigeant tous les cinq ans un plan d’action national pour sauvegarder l’espèce – Canis lupus – tout en trouvant des solutions pour une meilleure cohabitation avec l’Homme.
Présenté hier à Lyon par le ministère de la Transition écologique et celui de l’Agriculture, le Plan loup qui débutera dès le 1er janvier prochain était très attendu après la publication en mars 2017 d’une expertise scientifique collective demandé par le précédent gouvernement à l’ONCFS et au MNHN. Assez logiquement, le ministère de Nicolas Hulot en a tenu compte pour l’élaboration de son plan d’action, tranchant ainsi assez nettement avec la politique des précédents Plans loup
Les principales nouveautés introduites par le Plan loup 2018-2023
Plusieurs changements sont ainsi à répertorier !
Le calcul du quota de prélèvements
Jusqu’ici, l’Etat se prononçait dans chaque plan d’action sur le quota de loups pouvant être abattus, les fameux « tirs de prélèvement », et ajustait chaque année ce chiffre par le biais d’un arrêté ministériel. Par exemple, si le plan 2013-2017 permettait de tuer 24 loups chaque année, l’arrêté pris en 2015 autorisait en fait le prélèvement de 36 loups sur la période 2015-2016 !
Dans le Plan loup 2018-2023, conformément aux recommandations de l’expertise collective, le quota sera calculé en fonction de la taille de la population de loups en France pour atteindre 10 %. Un pourcentage qui, d’après l’étude, permettrait à l’espèce de rester stable sur notre territoire, sans la menacer. Toutefois, le futur Plan loup prévoit la possibilité d’autoriser des tirs supplémentaires dans la limite de 2 %, ce qui à terme – si cette option devenait habituelle – pourrait mettre l’espèce en péril.
Rappelons que juridiquement, aucun spécimen ne devrait être abattu tant que Canis lupus reste une espèce classée « en danger d’extinction » au niveau national. Ces quotas sont donc des dérogations à la loi permise par l’Etat.
Les possibilités « d’interventions » humaines sur la population de loups
Dans les précédents plans d’action, l’Etat autorisait à intervenir sur l’espèce via :
- les tirs de prélèvements, évoqués ci-dessus,
- les tirs de défense, réalisés en cas d’attaque d’un troupeau par un loup. En cas de « flagrant délit », le loup peut légalement être abattu.
- les tirs d’effarouchement : sous la forme de lumières, de sons, ou de tirs non mortels, le but étant de faire peur au loup.
Dans le Plan loup 2018-2023, si les trois formes d’interventions sont maintenues, les modalités changent pour les deux premières. Les tirs de prélèvement devront être autorisés par le préfet coordinateur et seront limités aux territoires où les attaques sont les plus nombreuses. Par ailleurs, ils auront lieu du 1er septembre au 31 décembre, donc hors période de reproduction, pour ne pas nuire à la pérennité de l’espèce. Les modalités pour les tirs de défense sont quant à elles assouplies. En cas d’attaque, les éleveurs sont autorisés à tirer sur un loup « à partir du moment où leurs troupeaux sont protégés ou reconnus comme ne pouvant être protégés ».
Le dédommagement des éleveurs
Quand un éleveur suspecte l’attaque d’un loup sur son troupeau, un agent habilité est nommé pour établir un constat sur place. Celui-ci doit être fait dans les 48 heures pour que l’indemnisation soit possible. Si l’attaque est avérée, l’ONCFS indemnise l’éleveur en fonction de l’espèce victime du prédateur. Le dédommagement financier peut faire suite à la mort d’un animal, à sa disparition ou à des « pertes indirectes suite à la perturbation du troupeau. » (Circulaire du 27 juillet 2011 relative à l’indemnisation des dommages causés par le loup aux troupeaux domestiques).
Parce que le « dossier loup » coûte de plus en plus cher à l’Etat, les associations demandaient à mettre sous condition ce dédommagement. Elles ont donc été entendus. Dans le Plan loup 2018-2023, seuls les éleveurs ayant mis en place des mesures de protection (chiens, parcs de regroupement pour la nuit, gardiennage humain) pour leur troupeau pourront être indemnisés. Un minimum de deux mesures est requis. Mais cette mesure phare, qui fait beaucoup grincer des dents côtés éleveurs, comporte beaucoup d’exceptions. D’abord, le gouvernement précise qu’elle sera « progressive et adaptée à la situation des élevages ». Ensuite, elle ne prend pas en compte les « fronts de colonisation dans lesquels la mise en œuvre des mesures de protection présente des difficultés importantes » du fait de la topographie, du mode d’élevage, etc » ce qui semble assez flou et promet d’être largement revendiqué par le monde agricole.
Sauf surprise, la version définitive du plan loup 2018-2023 ne devrait pas revenir sur ces mesures, bien qu’aucun des deux camps ne soit favorable à son instauration. Alors que nous attendons encore une réponse officielle de Cap Loup, le monde agricole a pour sa part tout simplement boycotté hier la réunion d’information et d’échange avec le gouvernement estimant dans un communiqué que ce nouveau plan d’action est « une énième provocation envers les éleveurs et un mépris de leur métier […] sacrifiés au nom de la protection et l’expansion du loup en France. » Sous le nom « collectif L113 », ils ont riposté en publiant il y a quelques heures une vidéo montrant les souffrances de plusieurs bêtes attaquées par le loup (brebis, veau mais aussi poulain, âne et chien). Des images choquantes pour dénoncer, d’après la vidéo, les 11 000 victimes du loup entre janvier et novembre 2017.
Consulter le Plan loup 2018-2023 dans sa version non-définitive.
2 Réponses to “Les grandes lignes du nouveau Plan loup dévoilées”
19.01.2018
BRASSOUD PIERRELe loup est un animal protégé. le loup était là avant nous (les éleveurs). Il faut savoir qu’un berger vend un mouton pour une somme d’environ 80€ à l’abattoir alors, qu’il en perçoit environ 300 lorsque c’est soit disant le loup. JE N’AI JAMAIS VU (même une meute), tué + de 200 moutons en une seule « attaque ». Pour les éleveurs le loup à: « bon dos »
09.01.2018
Gilles GALANDIl me semble assez incongru que le collectif L113 s’émeuve des souffrances des bêtes tués par les loups car ils n’élèvent pas ces animaux pour leur compagnie et sont nettement moins regardant quant au sort que leur réserve les abattoirs.
Le loup est au moins autant chez lui sur ces terres que les éleveurs; que l’on indemnise les pertes me parait normal, comme pour toute catastrophe naturelle.