La Thaïlande a profité de la CITES, qui se tient à Johannesburg (Afrique du Sud) jusqu’au 5 octobre, pour annoncer une suspension des exports d’hippocampes. Si cette décision peut paraître anodine, il n’en est rien : la Thaïlande alimente chaque année les marchés asiatiques en millions d’hippocampes séchés.
Mettre en place une pêche durable
Selon la CITES, la Thaïlande exporte environ 5 millions d’hippocampes séchés par an depuis 2004 : le pays détient 75% du marché mondial. Project Seahorses, une unité de recherche sur la protection de la faune marine basée à Vancouver (Canada), estime quant à elle que « les nombres réels sont en fait largement supérieurs ». L’annonce du gouvernement thaïlandais est donc vécue comme un grand succès pour la sauvegarde des 40 espèces d’hippocampes, dont 11 sont menacées. Elle permettra enfin d’instaurer une pêche durable et raisonnée, ce que demande la CITES depuis plusieurs années. Jusqu’à présent, les pêcheurs avaient recours au chalutage et capturaient donc les hippocampes sans aucune distinction : gestants, juvéniles, appartenant à une espèce menacée… Tous les spécimens capturés étaient séchés directement au soleil, puis vendus sur les marchés asiatiques. Le renouvellement des populations ne pouvait plus être assuré.
Alimenter la médecine traditionnelle asiatique
L’émergence de la pêche industrielle dans toutes les mers du globe a conduit à une chute de 80% des effectifs d’hippocampes en l’espace de trois décennies. En cause, la médecine traditionnelle asiatique, dans laquelle ces poissons présentent des vertus aphrodisiaques. Si cet usage existe depuis plusieurs siècles, il a littéralement explosé au milieu des années 2000, période pendant laquelle la classe moyenne chinoise est apparue. Selon l’ONG Save Our Seahorses, la consommation d’hippocampes a encore évolué au cours des dernières années : elle est désormais également destinée à stimuler la croissance des enfants et, pour les femmes, serait un substitut au Botox.
Des milliers de vitrines asiatiques mettent désormais en avant des hippocampes séchés. La CITES a bien inscrit en 2002 les 40 espèces d’hippocampes en Annexes I et II, en encadrant ainsi strictement le commerce, mais cela n’a pas suffi à enrayer la contrebande. Le 7 juin 2016, dernier exemple marquant en date, la police péruvienne a saisi huit millions d’hippocampes séchés dans un cargo en partance pour l’Asie. En France, fin août 2016, la douane a découvert 2000 de ces poissons dans des colis en provenance de Guinée et à destination du Vietnam. A l’échelle mondiale, le phénomène est difficilement quantifiable, mais il est clair que les espèces d’hippocampes font face à une grave menace d’extinction : Save Our Seahorses estime que 150 millions d’entre eux sont pêchés chaque année dans le monde afin d’alimenter la médecine traditionnelle asiatique.
Par Benoit Goniak.
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