Les scientifiques découvrent chaque année des dizaines de nouvelles espèces animales et végétales. Pourtant, la découverte de cette troisième espèce d’orangs-outans est véritablement une surprise. Le dernier grand primate à avoir été révélé au grand jour était un bonobo en 1929 ! Retour sur l’arrivée fracassante de Pongo tapanuliensis dans le cercle très fermé des Hominoïdés.
Une nouvelle espèce à 100 km seulement de l’orang-outan de Sumatra
Les orangs-outans sont les cousins Hominoïdés les plus éloignés de l’Homo Sapiens. Il s’agit également des grands primates sur lesquels nous avons peut-être le moins de connaissances, leurs habitats étant difficiles d’accès. Pourtant, les habitants de Sumatra avaient déjà signalé la présence d’orangs-outans au sud de l’aire de répartition de Pongo abelii – l’orang-outan de Sumatra – mais cette information n’avait étonné personne jusqu’à récemment. Publiés le jeudi 2 novembre dans le magazine spécialisé Current Biology, les travaux d’une vingtaine de chercheurs ont prouvé l’existence d’une troisième espèce d’orang-outan à seulement 100 km de l’aire de répartition de celle déjà bien connue de Sumatra.
D’après les dernières estimations, l’orang-outan de Sumatra compterait 14 613 individus et l’orang-outan de Bornéo – Pongo pygmaeus – environ 41 000. La toute jeune espèce Pongo tapanuliensis, l’orang-outan de Tapanuli, est estimée elle à moins de 800 membres, ce qui en fait l’un des primates les plus menacés du monde avec le gorille de la rivière Cross et celui des montagnes. La nouvelle espèce fera donc assez logiquement directement son entrée sur la liste rouge de l’UICN dans la catégorie « en danger critique d’extinction » où elle rejoindra les deux autres espèces d’orangs-outans.
Distinguer l’orang-outan de Tapanuli de celui de Bornéo et Sumatra
Si Pongo tapanuliensis n’a pas été découvert plus tôt, c’est que l’œil d’un novice aura bien des difficultés à le différencier de ses cousins situés à seulement 100 km de lui. En effet, seule la génétique a pu établir formellement la distinction. Pour cela, des chercheurs de l’université de Zurich ont comparé le squelette d’un individu mâle tué par des villageois en 2013 aux génomes de 37 autres individus de Bornéo et Sumatra. Les résultats ont été frappants : génétiquement et morphologiquement, des différences évidentes ont été constatées. L’orang-outan de Tapanuli a par ailleurs quelques particularités physiques qui permettraient de le reconnaître : son poil est bouclé, le mâle présente une moustache et des joues couvertes de poils blonds et non roux !
L’espèce la plus ancienne d’orangs-outans
L’étude du génome de cette nouvelle espèce a non seulement permis de l’authentifier mais également d’un apprendre plus sur la généalogie des Pongidés ! Nous savions déjà que les branches des orangs-outans de Bornéo et de Sumatra s’étaient séparées il y a environ 670 000 ans, mais l’étude de Pongo tapanuliensis a démontré que sa branche s’était, elle, éloignée de celle de son congénère de Sumatra il y a plus de trois millions d’années ! Cette découverte révèle que l’espèce récemment découverte est la plus ancienne du genre Pongidé et celle de Bornéo la plus récente !
Bien que tout juste reconnu, l’orang-outan de Tapanuli est déjà profondément menacé. Son aire de répartition s’étend sur 110 000 hectares, soit 1100 km², dont 85 % est reconnu comme « protégé » ; ce statut n’a pas empêché la proposition récente de construction d’un développement hydroélectrique là où se trouve la plus forte concentration de ces primates. Par ailleurs, l’espèce est actuellement divisée en trois populations géographiquement éloignées avec peu d’échanges entre eux. Des conditions idéales pour le développement d’une forte consanguinité.
A nos lecteurs : la photo de cet article n’est pas celle d’un orang-outan de Tapanuli mais celle d’un orang-outan de Bornéo
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