C’est officiel : le gouvernement espagnol a donné son accord en juin 2018 pour créer une aire marine protégée au large de ses côtes. Il ne s’agit pas de n’importe quelle zone mais d’un couloir migratoire emprunté par de nombreux cétacés.
Les espèces concernées
Longue de 1 350 km et s’étendant sur une surface totale de 46 385 km² entre, d’un côté, la costa Brava, la costa Maresme et la costa Barcelona et, de l’autre côté, les Baléares, cette nouvelle zone protégée abrite une faune et une flore marines exceptionnelles. Elle sert tout d’abord de passage obligé lors de la migration d’environ 3 500 rorquals communs (Balaenoptera physalus) – une espèce « en danger » selon l’UICN. Ces grands cétacés empruntent en effet ce chemin lorsqu’ils remontent des côtes africaines jusque dans le Golfe du Lion, au large de la France. La zone est aussi l’habitat naturel d’une dizaine de mammifères marins comme les dauphins bleus (Stenella coeruleoalba), les dauphins de Risso (Grampus griseus), la baleine de Cuvier (Ziphius cavirostris) ou encore la baleine à bosse (Megaptera novaeangliae). Environ 19 000 tortues caouannes (Caretta caretta) nagent également dans ces eaux.
La faune marine menacée en Méditerranée
Comme le rappelait WWF en 2016, la mer Méditerranée abrite une biodiversité fragile qu’il faut protéger. En effet, un grand nombre d’animaux marins qui y vivent sont menacés par la pêche, le transport maritime – un tiers du trafic mondial passe par là –, le tourisme – environ 350 millions de touristes chaque année – et l’exploration pétrolière et gazière en mer. Or, la création d’une telle aire marine protégée permettra de « prendre des mesures de prévention spécifiques pour réguler les activités humaines en mer », assure dans un communiqué le Plan d’action pour la Méditerranée de l’ONU Environnement (PAM) qui chapeaute le projet. C’est en ce sens qu’est par exemple né en 1999 le sanctuaire Pelagos, plus grande aire marine protégée de Méditerranée.
Tout découle de l’adoption en 1976 de la convention de Barcelone selon laquelle 21 pays bordant la mer Méditerranée se sont engagés à participer à la protection du milieu marin et de leur littoral. La création d’aires marines protégées fait partie intégrante de ces engagements et c’est le PAM qui a pour mission d’appliquer la convention de Barcelone sur le terrain.
Le but des aires marines protégées
En 2018, moins de 9 % de la mer Méditerranée est une aire protégée et seulement 5,3 % des océans dans le monde. On est donc encore loin du but fixé par l’ONU et accepté par 193 pays dans le cadre des Objectifs de développement durable, à savoir les aires marines protégées doivent couvrir 10 % des océans de la planète d’ici 2020. Pourtant lorsqu’elles sont gérées efficacement, ces zones sont aujourd’hui reconnues comme étant l’un des moyens les plus efficaces pour lutter pour la conservation et la protection de l’environnement marin.
Le PAM espère atteindre cet objectif pour la Méditerranée en créant d’ici 2020 de nouvelles zones protégées. Pour cela, l’organisme a établi en 2012 une feuille de route afin que chaque pays concerné place 10 % de ses côtes sous le statut d’« aire marine protégée ». Madrid vient de remplir et même dépasser cet objectif, mais ce n’est pas le cas d’autres pays. Comme l’a déclaré le coordinateur du PAM, Gaetano Leone, « cette zone protégée décrétée par l’Espagne est l’un des développements les plus importants de ces dernières années pour la convention de Barcelone ». Espérons que d’autres suivent l’exemple.
par Jennifer Matas
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