Comme chaque année ou presque à partir du mois de novembre, l’Australie connaît de fortes vagues de chaleur. Les températures dépassent les 40°C et parfois même 50°C sur la plupart du territoire. Ce qui n’est pas sans causer de graves dégâts sur la faune. La canicule de 2018 a malheureusement été particulièrement dévastatrice.
23 000 renards volants à lunettes tués
Les chercheurs de l’Université Western Sydney qui se sont penchés sur le sujet sont formels : les fortes chaleurs du mois de novembre 2018 ont tué plus de 23 000 renards volants à lunettes, soit un tiers de la population australienne de cette espèce de chauve-souris. Une véritable hécatombe. Elle était estimée jusqu’alors à 75 000 individus.
D’après Justin Welbergen, de l’Institut pour l’environnement de Hawkesbury repris par ABC, il s’agit du deuxième épisode le plus meurtrier jamais enregistré pour cette espèce en Australie. « Le premier s’est produit en 2014 dans le Queensland. Près de 46 000 animaux, principalement des renards volants à lunettes, avaient trouvé la mort », a rappelé l’écologiste.
Disparues en l’espace de deux jours
Cette catastrophe est d’autant plus grave que tous ces animaux ont été tués en l’espace de deux jours seulement, les 26 et 27 novembre. Deux journées particulièrement chaudes au cours desquelles le mercure est rarement redescendu en-dessous des 40°C. Or au-delà des 42°C, ces chauves-souris peuvent subir un stress thermique tel qu’elles en meurent. Justement, dans la ville de Cairns où les cadavres de renards volants à lunettes se sont multipliés, des records de températures à 42,6°C ont été enregistrés. Les médias australiens rapportent que les corps de chauves-souris mortes tombaient des arbres en grand nombre. Rapidement, l’amoncellement de toutes ces carcasses en putréfaction a dégagé de très fortes odeurs, contraignant les habitants à quitter leur domicile.
Sans compter qu’1 % de la population de renards volants à lunettes serait porteuse du Lyssavirus de la chauve-souris australienne, un virus proche de celui de la rage et transmissible à d’autres espèces, dont l’Homme. Il a donc fallu ramasser les carcasses rapidement et en prenant toutes les précautions possibles.
Très présente dans le Queensland
Le renard volant à lunettes (Pteropus conspicillatus) est une grande espèce de chauve-souris qui vit en Papouasie-Nouvelle-Guinée, en Indonésie et en Australie. Sur l’Ile-Continent, on la trouve principalement dans l’Etat du Queensland. Elle peuple les forêts pluviales du Nord, de la péninsule du Cape York jusque Rockhampton, sur la côte.
Frugivores, ces chauves-souris sont des pollinisateurs naturels des arbres fruitiers et jouent donc un rôle essentiel dans l’écosystème.
Une espèce à protéger
D’après l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), sa population est stable et, pour l’instant, pas menacée. L’organisme classe en effet l’espèce dans sa catégorie « least concern » (LC), c’est-à-dire « peu concernée » par l’extinction. Mais cette estimation remonte déjà à 2008. Entre temps, dix années se sont écoulées et nombre d’experts tirent la sonnette d’alarme. « Au cours de la dernière décennie, sa population a plus que diminué de moitié », confie à la BBC le Dr David Westcott, en charge du programme national de surveillance de l’espèce.
Les renards volants à lunettes sont déjà victimes de mortalités massives lorsque de violents ouragans frappent l’Australie. A cela s’ajoute désormais une nouvelle menace : celle des vagues de chaleur et du réchauffement climatique.
Compte tenu de ces disparitions massives, plusieurs personnes et organismes réclament que l’espèce soit immédiatement classée comme étant « en voie de disparition ». Human Society International (HSI) avait déjà fait cette demande en 2015. « A l’époque, la science nous indiquait indéniablement que l’espèce était en danger, écrit HSI dans un communiqué. C’était il y a près de quatre ans et la situation n’a fait qu’empirer, tandis que les ministres de l’environnement n’ont pas agi. L’inscription sur la liste des espèces en danger critique d’extinction constitue désormais le plan d’action le plus approprié. »
par Jennifer Matas
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