Pour sauver certaines espèces, les scientifiques procèdent régulièrement à l’élevage en captivité puis à la réintroduction d’animaux sains sur le territoire d’origine ou un site plus propice. Mais cet élevage en captivité, quand il est trop tardif, ne permet le prélèvement que de quelques spécimens et donc entraîne une consanguinité évidente. Dans le cas du kakapo, la consanguinité est surtout due à l’isolement de l’espèce et à sa faible taille. Une étude récente tend à prouver que ce n’est pas toujours une mauvaise chose.
Le kakapo passé à quelques encablures de l’extinction
Qui ne connait pas le kakapo ?! Cet oiseau au plumage vert – unique perroquet au monde à ne pas pourvoir voler – emblématique de la Nouvelle Zélande dont il est endémique. Oiseau sympathique et surtout fragile ! L’arrivée de nouveaux prédateurs couplée à la disparition de son habitat et à un faible taux de renouvellement de la population ont valu à l’espèce de frôler l’extinction. En 1995, il ne restait que 51 kakapos. 25 ans plus tard, Strigops Habroptila est loin d’être sorti d’affaire !
Toujours classé en danger critique d’extinction par l’UICN, son effectif a cependant augmenté grâce notamment à une excellente natalité en 2019 ! Aujourd’hui, on compte environ 200 perroquets kakapos. Une faible population fortement consanguine.
Une consanguinité parfois positive
Mais cette consanguinité, qui d’habitude inquiète fortement les chercheurs puisqu’elle engendre des possibles malformations et des faiblesses génétiques, pourrait finalement se révéler bénéfique ! Osons dire le mot.
Une étude réalisée par des chercheurs néo-zélandais et suédois a révélé que malgré leur faible diversité génétique, les kakapos auraient perdu au cours de leur reproduction « un certain nombre de mutations potentiellement nocives plutôt que de les accumuler comme le suggéraient les théories précédentes ».
Pour obtenir cette conclusion, le génome de 49 kakapos a été analysé, 35 vivant sur l’île Stewart et 14 parmi la population continentale fonctionnellement éteinte.
L’un des auteurs de cette étude, le Dr Nicolas Dussex, chercheur au Center for Palaeogenetics et à l’Université de Stockholm, révèle finalement que l’isolement de l’espèce est une bonne chose. « Nos données montrent que la population survivante de l’île Stewart [NDLR : troisième île qui compose la Nouvelle-Zélande] est isolée depuis environ 10 000 ans et que pendant ce temps, des mutations nuisibles ont été supprimées par la sélection naturelle dans un processus appelé » purge » et que la consanguinité l’a peut-être facilité. »
Baptisé Richard Henry, un kakapo mâle seul survivant de l’île du Sud de la Nouvelle-Zélande découvert en 1975 et décédé en 2010, présentait à lui seul plus de mutations nocives que les oiseaux de l’île Stewart. Cependant, son patrimoine génétique reste primordial pour l’espèce, et heureusement il s’est reproduit une dernière fois en 1998 avant de nous quitter.
« Bien que l’espèce soit toujours en danger critique d’extinction, ce résultat est encourageant car il montre qu’un grand nombre de défauts génétiques ont été perdus au fil du temps et que la consanguinité élevée à elle seule ne signifie pas nécessairement que l’espèce est vouée à l’extinction », explique Nicolas Dussex.
De quoi donner de l’espoir au tigre de Chine méridionale, au diable de Tasmanie ou encore à la panthère de l’Amour.
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