Depuis quelques mois, les articles alarmants se multiplient dans la presse canadienne. Et pour cause, la situation est de plus en plus préoccupante pour la biodiversité du pays. Le Canada est aujourd’hui directement pointé du doigt pour son manque de protection envers les espèces menacées.
Tout démarre en 2013 lors de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES). Le Canada est l’unique pays à exprimer des “réserves” sur les 76 espèces menacées proposées. Pour les protecteurs de l’environnement canadien, c’est le début d’une longue croisade contre le gouvernement du premier ministre Stephen Harper. Depuis, les atteintes aux lois de protections de la faune et de la flore se sont multipliées. Récemment, de grandes coupes budgétaires se sont soldées par la suppression de nombreux postes de biologistes et scientifiques au ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP). Des nouvelles qui se multiplient et qui ne sont pas pour rassurer les défenseurs de l’environnement.
Espèces menacées VS industrie
Prenons l’exemple de deux animaux emblématiques du Canada sauvage : les bélugas et les caribous.
TransCanada, société canadienne spécialisée dans les oléoducs, avait pour projet la construction d’un terminal pétrolier dans le fleuve Saint-Laurent à hauteur d’une ville appelée Cacouna… sauf que cette zone est justement celle où se reproduisent les bélugas chaque année. Levée de boucliers générale de la part des organisations environnementales qui craignent pour l’espèce : alors que les travaux ont déjà commencé, le Comité sur la situation des espèces en péril du Canada (COSEPAC) parvient à faire suspendre les forages. En avril 2015, le pétrolier renonce finalement à son projet. Une fin heureuse pour combien de malheureuses ? La population de bélugas est passée de 10 000 à moins d’un millier.
La Société pour la nature et les parcs (SNAP) regrette ces décisions politiques : “ Obnubilé par le potentiel pétrolier du golfe du Saint-Laurent, le Québec traîne les pieds face à des projets de parcs marins qui feraient de lui un chef de file canadien de la protection des océans”.
Dans le cas du caribou, c’est l’exploitation forestière qui est pointée du doigt. En tant qu’espèce en péril, le caribou forestier fait l’objet d’un plan de rétablissement qui prévoit la protection de l’aire de répartition de l’animal et de son habitat. Des mesures qui vont à l’encontre des ambitions des industriels qui y voient avant tout une perte de matière première ! A ce sujet, Jean-Pierre Boivin, préfet de la MRC Maria-Chapdelaine, déclare : « Si le plan caribou du [gouvernement] fédéral était mis en place demain matin, il y aurait certainement des pertes de possibilités forestières. ». Le préfet a donc demandé la mise en place d’un comité de travail pour évaluer l’impact des pressions exercées par les groupes environnementaux sur les compagnies forestières…
L’éternel combat de l’industrie contre l’environnement bat son plein !
Focus sur le Québec
Si au Canada, 345 espèces végétales et animales sont menacées, attardons-nous sur notre cousin francophone, le Québec.
En 2015, le gouvernement du Québec a déclaré 38 espèces vulnérables. Un chiffre en augmentation de 375 % en 15 ans puisque 8 espèces seulement figuraient sur la liste en 2000. Pour les protéger, la province canadienne a voté en 1989 une loi sur les espèces menacées ou vulnérables. Mais le Québec est touché par les mêmes restrictions budgétaires que le reste du pays et les spécialistes craignent que ces mesures soient jetées aux oubliettes : « Déjà, les plans de rétablissement étaient peu appliqués. Là, on a peur qu’ils soient abandonnés. C’est une détérioration de la situation », a dénoncé Philippe Blais, président du Conseil régional de l’environnement de la Montérégie.
Autre sujet sensible, les zones protégées. Les menaces pesant sur la biodiversité étant toutes d’origine humaine (pollution, agriculture, exploitation forestière etc.) le Québec s’était donné pour objectif de transformer 12 % de son territoire en aires protégées en 2015. Mais dans les faits, nous n’en sommes qu’à 9%, alors qu’en 2011, soit il y a 4 ans, on atteignait déjà les 8,35 %.
Surtout, le territoire marin est particulièrement délaissé. 1,3 % est sous protection contre les 10 % auquel la province s’était engagée. Pire encore, la pêche et l’exploitation pétrolière sont tolérées dans ces territoires dits “protégés”. Une situation pointée du doigt par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) qui, en novembre 2014, houspillait les gouvernements auteurs d’aires protégées « de papier » ou « alibis » dans le but de remplir leurs objectifs.
Pour autant, le découragement n’est pas général : des organisations oeuvrent quotidiennement pour la défense de la biodiversité et obtiennent des victoires. Nature Québec, membre de l’IUCN, est l’une des plus importantes du pays. L’une de ses missions est justement d’établir “un vaste réseau d’aires protégées représentatives de la biodiversité” tout en proposant “des solutions de remplacement afin de réduire les impacts de l’exploration et de l’exploitation énergétique sur les milieux naturels”.
Rappelons que le Canada s’étend sur 9 984 670 km2 , dont 348 millions d’hectares de terres forestières, soit 9 % des forêts mondiales et 24 % des forêts boréales dans le monde. L’eau occupe 891 163 km2. En 2012-2013, l’industrie forestière générait 58 milliards de dollars, soit 1,25 % du PIB total (Source : Association des produits forestiers du Canada).
Pétition à destination du Premier Ministre Harper, pour la protection des espèces menacées
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