Il s’agit de l’un des oiseaux les plus menacés de la planète et aussi de l’un des plus méconnus. Le hocco de Natterer, anciennement sous-espèce du hocco à face nue (Crax fasciolata), est endémique du Brésil où il n’a pas été vu depuis 1978. Mais après plusieurs années de recherche, des ornithologues ont récemment découvert plusieurs mâles.
Le hocco de Natterer : un oiseau aussi rare qu’il est menacé
La bonne nouvelle a été publiée dans le journal du Museum de l’Université de São Paulo avant d’être reprise en France par le média spécialisé Ornithomedia. Une équipe de chercheurs a effectué plus de 400 heures d’observation entre 2004 et 2018 tout en s’aidant de pièges photographiques dans le but d’apercevoir un oiseau aussi rare qu’il est menacé : le hocco de Natterer. La dernière observation de spécimens sauvages a eu lieu en 1978 et depuis, plus rien.
Personne ne sait combien de Crax pinima il reste à l’état sauvage. Son observation est rare et l’identification de quelques spécimens seulement ces quatorze dernières années laisse présager qu’il resterait moins de 100 individus. Peut-être même moins de 50. L’espèce est classée en danger critique d’extinction (CR) par l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN). Une espèce si rare que certains en étaient venus à se demander si elle n’était pas tout simplement éteinte.
Premières observations depuis plus de 30 ans
Par chance, une équipe de 15 ornithologues, principalement brésiliens, a entrepris en 2004 des recherches dans deux Etats de la forêt amazonienne : celui du Pará et du Maranhão. Elle a obtenu plusieurs images de spécimens sauvages et de nombreux témoignages d’indigènes ayant aperçu ou possédant un oiseau de cette espèce. Le hocco de Natterer habite dans le nord-est de l’Amazonie, la région où la forêt primaire est la plus touchée par la déforestation. Par exemple, dans la réserve indigène de Terra Indígena Mãe Maria (TIMM), les quelques 62.000 hectares de forêts sont traversés par une autoroute, un chemin de fer et des lignes à haute tension.
Crax pinima existe toujours : oui, et après ?
Dans leur étude, les chercheurs n’ont pas fait que rapporter leurs observations. Ils donnent également des recommandations pour protéger le hocco de Natterer de l’extinction. Actuellement, les menaces qui pèsent le plus sur cet oiseau sont la disparition de son habitat et la chasse. En effet, Crax pinima est recherché pour sa chair mais également pour ses plumes, et notamment celles des femelles qui sont utilisées dans les costumes de cérémonies indigènes. Car si mâles et femelles sont noirs, ces dernières arborent sur leur plumage supérieur des plumes striées de blanc. Un dimorphisme sexuel présent également chez le hocco à face nue (Crax fasciolata) et qui permet de différencier les deux sexes.
Un programme de reproduction ex-situ
Face à ces causes de disparition, les experts proposent la mise en place d’un programme de reproduction en captivité (ex-situ) tout en précisant que ces oiseaux, comme tous ceux de leur famille – les Cracidés –, sont faciles à reproduire et à élever en captivité. Ce type de programme d’élevage a déjà fait ses preuves, comme pour le fuligule de Madagascar qui est passé de 25 spécimens en 2006 à 114 en 2019.
La protection de son aire de répartition
La disparition de son habitat est sans doute la menace la plus importante qui pèse sur Crax pinima. Les feux de cet été dans la forêt amazonienne nous rappellent à quel point ce site est fragile. Aux incendies s’ajoutent les coupes illégales de bois, le braconnage de la faune et la conversion en exploitations agricoles de ces terrains fertiles.
« Ces terres ont besoin d’une protection plus large et plus efficace, avec plus de surveillance et la création de nouveaux sites de conservation entièrement protégés. Le réserve biologique de Gurupi est la plus importante de la région et elle souffre du développement des terres agricoles, de son occupation illégale et non durable et de la forte pression du braconnage », expliquent les chercheurs, dans leur article publié le 21 octobre 2019.
Malheureusement, le contexte au Brésil n’est pas à la protection de l’environnement. En 2017, le pays était en tête des nations où il y a eu le plus de militants écologistes abattus.
L’étude de l’espèce hocco de Natterer
Outre les menaces externes, la conservation de l’espèce ne peut se faire sans approfondir nos connaissances à son sujet. Taille de la population, reproduction, régime alimentaire, zone de répartition stricte… Les ornithologues recommandent la capture d’oiseaux sauvages afin d’étudier leur comportement en captivité pour mieux les comprendre et protéger en milieu naturel.
La sensibilisation des peuples autochtones
Bien que ces oiseaux soient rares, bon nombre d’indigènes ont rapporté leurs observations aux chercheurs. Une proximité qui en fait à la fois les principaux acteurs de la disparition comme de la protection de l’espèce. Pour cette raison, les chercheurs proposent d’inclure les communautés locales dans un futur programme de réintroduction et de les sensibiliser aux pressions de la chasse sur l’espèce.
NDLR : les photos qui illustrent cet article sont celles du cousin de hocco de Natterer, le hocco à face nue (Crax fasciolata).
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