Ce mardi 29 septembre, Barbara Pompili, ministre de la Transition écologique, a fait une série d’annonces au sujet des animaux sauvages en captivité. « Fauve, éléphants, singes, dauphins ou encore visons, il est temps d’ouvrir une nouvelle ère dans notre rapport à ces animaux », explique la ministre. Voici les annonces du gouvernement d’Emmanuel Macron en faveur du bien-être de la faune sauvage captive.
Après près d’un an et demi de consultations avec les acteurs du milieu – ONG, professionnels du monde de la captivité, vétérinaires – et les élus, initiées par son prédécesseur François de Rugy, la ministre de la Transition écologique a annoncé quatre grandes mesures concernant la faune sauvage en captivité.
La fin de la présence d’orques et dauphins en captivité
Une thématique chère à Barbara Pompili qui, lorsqu’elle était Secrétaire d’État chargée de la biodiversité, avait tenté d’interdire la reproduction des orques et des dauphins dès 2017 aux côtés de Ségolène Royal. Ce mardi 29 septembre 2020, Barbara Pompili s’attaque à nouveau à la présence de ces deux cétacés en delphinariums :
- interdiction d’ici 2 ans (2022) de la détention à des fins de spectacles d’orques (sauf sanctuaire, sans spectacle) ;
- interdiction d’ici 7 ans (2027) de la détention des dauphins à des fins de spectacles (sauf sanctuaire) ;
- interdiction immédiate de la délivrance d’autorisation d’ouverture de nouveaux établissements présentant des cétacés à des fins de spectacles ;
- interdiction immédiate de la reproduction des cétacés en captivité ;
- interdiction immédiate de l’introduction de nouveaux cétacés dans des structures à des fins de spectacle.
L’interdiction de reproduire les animaux actuellement en captivité couplée à celle d’introduire de nouveaux animaux signe en réalité la fin de la présence d’orques et de dauphins en captivité à moyen terme. La notion de détention à des fins de spectacles reste toutefois à éclaircir. Un parc animalier qui n’organise pas de spectacle mais qui présente des animaux visibles des spectateurs pourrait donc introduire de nouveaux cétacés mais non les reproduire ? Ce ne sont pourtant pas des sanctuaires, contrairement aux centres de soins spécialisées dans la faune sauvage aquatique comme anciennement Picardie Nature, l’association Chene ou encore le centre de soins d’Océanopolis à Brest.
La fin des delphinariums 🐬, une presque longue histoire de l’écologie politique française cc @ArthurNazaret :
❌ Mars 2015 : @LaurenceAbeille propose l’interdiction des delphinariums par amendement à la #loiBiodiv. Rejeté.
— Loïc Agnès (@LoicAgnes) September 29, 2020
La présence de delphinariums en France est depuis longtemps sujet à polémique. En France, trois établissements accueillent actuellement des cétacés : deux parcs animaliers, Planète Sauvage et le Marineland, et le parc d’attractions Parc Astérix. Le célèbre ZooParc de Beauval avait annoncé vouloir créer un bassin spécial pour accueillir des dauphins mais avait dû faire marche arrière après le tollé que l’annonce avait soulevé.
La fin progressive de la faune sauvage dans les cirques itinérants
Autre sujet sur lequel le gouvernement était très attendu : les cirques itinérants. En 2017, un tigre échappé du cirque Bormann Moreno avait semé la zizanie à Paris avant d’être abattu par son propriétaire. Le fait divers avait profondément choqué le pays et relancé le débat sur la présence des animaux sauvages dans les cirques.
Le cirque Bormann s’installe sous nos fenêtres à Libé. Trois tigres tournent en rond dans 3 mètres carré. Ça va me rendre folle. pic.twitter.com/xJ4Wx3dj3o
— Camille Gévaudan (@khomille) November 14, 2017
Suite à cette affaire, la mairie de Paris avait tout bonnement interdit les cirques présentant des numéros avec des animaux sauvages dans la capitale. Trois ans plus tard, Barbara Pompili va plus loin et annonce la fin progressive de la faune sauvage dans les cirques itinérants.
- Interdiction de la détention d’animaux d’espèces sauvages dont le degré d’incompatibilité de la détention en itinérance avec leurs besoins est important (notamment les fauves, les singes, les ours, les loups ou ceux nécessitant des bassins ou de grandes quantités d’eau comme les hippopotames, les otaries, les éléphants, etc.) ;
- interdiction de reproduction des animaux issus d’espèces sauvages concernés par les mesures d’interdiction ci-dessus ;
- interdiction immédiate de la délivrance d’autorisations pour les nouveaux établissements itinérants détenant des animaux d’espèces sauvages concernés par les mesures d’interdiction.
Si les mesures sont claires, reste à connaître la liste exacte des espèces concernées, dites incompatibles avec la détention en itinérance. Par exemple, les chevaux, très présents dans les cirques, ne devraient pas être concernés par cette annonce, n’étant pas considérés comme des animaux sauvages. Pourtant, leur besoin de grands espaces n’est plus à démontrer.
La fin des élevages de visons pour leur fourrure
- Interdiction immédiate d’ouverture de nouveaux élevages de visons d’Amérique ;
- fin de l’élevage de visons d’Amérique (échéance 2025).
D’après L214, il resterait aujourd’hui en France quatre élevages de visons d’Amérique destinés à la production de fourrure. Récemment, l’association avait tourné une vidéo choquante dans un élevage de Vendée, montrant des animaux dans des conditions de vie effroyables.
Outre l’aspect production de fourrure, ces élevages étaient également montrés du doigt pour être l’une des causes de disparition du vison d’Europe, Mustela lutreola, espèce en danger critique d’extinction sur la liste rouge de l’UICN. 86 % des visons d’Amérique sauvages présents aujourd’hui en France proviendraient d’animaux échappés de ces élevages. Les visons d’Amérique auraient pris la niche écologique de son cousin européen, causant ainsi sa disparition.
Le soutien aux parcs zoologiques qui améliorent leurs conditions de détention
Dans son allocution à la presse, la ministre dit vouloir « ne plus favoriser la captivité [de l’animal sauvage] par rapport à [son] bien-être. Bien plus qu’une menace ou qu’une proie, l’animal sauvage est avant tout un être à préserver et à respecter dans son intégrité ». Pour cela, elle souhaite que le gouvernement légifère au sujet des parcs zoologiques, lieu de captivité de la faune sauvage par excellence :
- instauration de normes de détention visant à améliorer le bien-être de la faune sauvage captive en zoos pour certaines espèces, comme l’ours polaire (température, accès à des zones d’ombre…) ;
- instauration de mesures d’encadrement des spectacles en zoos (exemple : interdiction du public de toucher les animaux).
Des mesures somme toute assez floues contrairement aux autres annonces de la journée. Pour améliorer le bien-être des pensionnaires de ces parcs, la ministre propose d’accompagner ces établissements vers un changement d’activité ou de faire évoluer « certains spectacles ». On comprend que comme pour les delphinariums, c’est bien la notion de spectacle et non de présentation au public le problème. Dans les mesures proposées pour améliorer le bien-être, on notera que la volonté d’améliorer les formations des professionnels de l’Etat chargés des contrôles de ces sites.
En revanche, on ne sait pas quelle forme prendra le soutien aux parcs zoologiques. Aide financière, fiscale, logistique, politique ?
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