La pandémie de Covid-19 et les consignes de confinement ont-elles provoqué une baisse ou une hausse du braconnage ? La question est légitime tant les informations dans la presse internationale sont contradictoires. Pour en discuter avec nous, Sergio Lopez, fondateur de Wildlife Angel, ONG qui forme des rangers à lutter contre le braconnage en Afrique.
Les différentes formes de braconnage
Le trafic d’espèces menacées est le quatrième commerce illégal le plus important dans le monde. D’après le réseau de surveillance TRAFFIC, il générerait entre 15 et 20 milliards de dollars chaque année. Face aux fermetures des frontières des derniers mois, comment les braconniers ont-ils réagi ? La réponse est plus complexe qu’il n’y parait : « La situation est très différente qu’on soit au Burkina Faso ou en Afrique du Sud. D’un pays à l’autre ça n’a rien à voir. Il faut bien veiller à ne pas faire d’amalgame », nous explique Sergio Lopez.
En effet, si la définition du braconnage consiste à chasser ou pêcher une espèce protégée, l’ONG Wildlife Angel a identifié plusieurs types de braconnage. « Lors de nos formations, nous apprenons à nos rangers à discerner le père qui abat une gazelle pour nourrir sa famille du crime organisé. » Si toutes les formes de braconnage sont bien sûr illégales, ce sont les organisations criminelles qui font le plus de ravages.
Une forte augmentation du braconnage de subsistance
Durant toute la crise du Covid-19 en Afrique, Sergio Lopez est resté en lien avec les rangers sur place. « On a ressenti une baisse du braconnage criminel de haut niveau grâce aux difficultés d’acheminement vers les pays commanditaires, comme le marché asiatique. A contrario, le braconnage d’espèces pour le marché intérieur africain a augmenté. Buffles, antilopes… toutes les espèces de viande de brousse ont été davantage braconnées. »
En effet, le confinement a provoqué une vague importante de chômage qui s’est traduite par une hausse du braconnage de subsistance. « Les gens braconnent pour nourrir leur famille, et pour la plupart seulement parce qu’ils en ont besoin », a déclaré un porte-parole de la fondation Noah’s Ark Foundation au journal britannique Independant.
Même constat en Asie où des ibis géants – Thaumatibis gigantea – espèce classée en danger critique d’extinction par l’UICN, ont été braconnés pour leur viande. Tout comme une centaine de tantales indiens, prélevés directement dans un sanctuaire pour oiseaux.
A Mayotte, ce sont les tortues qui ont fait les frais du Covid-19. Si le braconnage de ces espèces menacées n’est pas nouveau sur l’île qui accueille cinq des huit espèces de tortues marines, il a explosé depuis le début de la crise sanitaire. L’association Oulanga Na Nyamba a alerté les autorités fin avril du massacre en cours. « 28 tortues ont été braconnées depuis le 17 mars sur la seule plage de Moya, la deuxième plus importante plage de ponte de Mayotte. Tous les jours, de nouveaux cadavres sont signalés sur cette plage, qui n’est pas la seule à être affectée : des signalements de tortues massacrées sont faits tout autour de l’île. »
Le prolongement de l’état d’urgence sanitaire sur l’île – où le virus circule encore activement – jusqu’au 30 octobre inquiète donc avec raison les associations animales locales.
La baisse du tourisme, une aubaine pour les braconniers
Rapatriement des étrangers, fermeture des frontières, confinement des populations…Les parcs nationaux et réserves de faune sauvage ont été vidés de leur population… humaine. Une aubaine pour les braconniers qui ont pu s’en prendre aux animaux menacés sans craindre de se faire repérer.
Plus de 50 écogardes communautaires protégeant la faune sauvage du Kenya & de la Tanzanie se sont réunis pour réaliser une patrouille frontalière commune en mai. Au beau milieu des creux touristiques causés par le COVID-19, la faune sauvage court un risque de braconnage élevé. pic.twitter.com/1qtNIJD7nr
— ifaw France (@ifawFR) June 12, 2020
En Afrique du Sud, où le commerce de cornes de rhinocéros est autorisé sur le territoire national, les cas de braconnage sur cette espèce et sur les éléphants sont une augmentation. Alors même qu’il y a quelques mois, l’UICN se félicitait de l’augmentation de la population de rhinocéros noirs en Afrique.
Durant la pandémie, les braconniers n’ont plus eu peur d’être dérangés par les groupes de touristes. « Les gouvernements africains tirent profit des nombreux propriétaires de réserves privées. Leur modèle économique est simple, les animaux sont entretenus grâce à l’écotourisme. L’impact de ces trois mois de confinement est énorme pour eux. Même durant la pandémie, il faut s’occuper des animaux, les protéger, disposer des points d’eau en cas de sécheresse, donner des compléments alimentaires parfois. Sans le tourisme, est-ce qu’ils vont continuer à le faire ? » questionne Sergio Lopez qui craint également le licenciement de rangers.
Et pour cause. Chargés de protéger la faune sauvage, les rangers ou éco-gardes sont employés par l’Etat ou par les propriétaires des réserves, pour qui la baisse des revenus touristiques constitue un important manque à gagner. Et quand on gagne moins, on dépense moins…
1 réponse to “Covid-19 : répit pour la faune ou aubaine pour les braconniers ?”
04.08.2020
Sylvie NkolomoniBonjour chers tous
J ose croire que tout va bien.
J ai été invité à participer à une émission de la biodiversité a la radio et télévision nationales. J ai besoin de votre accompagnement pour pouvoir être efficiente. En effet, je suis membre de l équipe technique de la stratégie de lutte contre les commerce illicites et l exploitation illégale de nos produis de la faune et flore sauvage. La RDC n a jamais eu de restitution des décisions de l UE sur la stratégie.