
Le nombre d’espèces menacées dans le monde augmente chaque année. En 2018, elles étaient 25 841 d’après l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), soit 1 342 de plus qu’en 2017. Et l’avifaune ne fait pas exception à la règle : partout sur Terre, les oiseaux sont de plus en plus menacés d’extinction.
Une espèce d’oiseau sur huit menacée sur la planète
C’est l’ONG BirdLife qui tire la sonnette d’alarme dans un rapport inédit sur « L’état des oiseaux dans le monde », publié en avril 2018. Sur les 11 121 espèces d’oiseaux qui existent, 13 % sont menacées soit au total 1 469 dont 222 sont en danger critique d’extinction (CR), 461 en danger (EN) et 786 vulnérables (VU). Pire, 40 % voient leur population décliner, laissant présager dans un futur proche l’inscription de nouvelles espèces sur la liste rouge de l’UICN. Or, comme l’expliquent les auteurs de ce rapport qui ont étudié la question pendant cinq ans, l’état de l’avifaune mondial est un bon thermomètre de l’état de santé général de la biodiversité, les oiseaux étant présents dans tous les écosystèmes mondiaux ou presque.
Les vautours particulièrement en danger
Tous les oiseaux ne sont pas égaux face au déclin. En effet, certaines familles sont plus exposées que d’autres, à commencer par les vautours. Sur les seize espèces qui existent dans le monde, seules deux sont classées comme « peu concernées » (LC) par le risque de disparition. Or, elles étaient douze en 1994 et une seule était menacée, le vautour chassefiente (Gyps coprotheres), alors référencée parmi les espèces « vulnérables ». Aujourd’hui, la tendance s’est clairement inversée : 69 % des espèces de vautours sont menacées et 50 % sont en danger critique d’extinction à l’instar du vautour de Pondichéry (Sarcogyps calvus) et du vautour à tête blanche (Trigonoceps occipitalis). D’après BirdLife, cette disparition soudaine trouve différentes raisons selon l’endroit où cela se produit sur Terre. En Asie du Sud, par exemple, le déclin a été particulièrement rapide puisqu’entre 1993 et 2000, 95 % des populations de vautour ont disparu, principalement à cause de nombreux cas d’empoisonnement dont elles ont été les victimes. En Afrique, en revanche, les raisons sont multiples et proviennent des persécutions de la part de l’Homme à l’égard des vautours, du braconnage, de la destruction de leur habitat, du manque de nourriture ou encore d’accidents de vol avec des lignes électriques ou des éoliennes. En 30 ans, les sept espèces de vautours africains ont perdu entre 80 et 97 % de leur population.
D’autres groupes d’oiseaux sont également plus menacés que les autres, comme les grues (73 % des espèces sont en danger), les albatros (68 %) dont l’albatros des Galápagos (Phoebastria irrorata), et dans une moindre mesure les perroquets (29 %).
Les principales menaces qui pèsent sur les oiseaux
L’agriculture
En tête des pires fléaux qui contribuent à la disparition des oiseaux, le rapport BirdLife pointe les pratiques agricoles non durables et intensives. Celles-ci pèseraient sur les populations de 1 091 espèces menacées, autrement dit sur 74 % du global. L’ONG désigne plus précisément des cultures comme celles du café, du sucre, du chocolat, de l’huile de palme ou encore du soja qui atteignent des records au détriment des écosystèmes environnants.
La déforestation
Toutes les minutes, l’équivalent de quarante terrains de football de forêts disparaissent dans le monde, soit plus de 13 millions d’hectares chaque année. Si l’on se concentre sur les pertes nettes, qui tiennent compte des opérations de reforestation, la tendance est toute aussi alarmante puisqu’entre 1990 et 2015, la planète a perdu 129 millions d’hectares, ainsi que le rappelle l’organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Des chiffres qui donnent le tournis, et sont corrélés aussi bien à l’agriculture avec l’extension continue des terres agricoles sur la forêt, qu’à l’abattage pour le bois de chauffage ou la création de pâtures pour le bétail. Or, un grand nombre d’oiseaux dépendent des forêts pour vivre, se nourrir et se reproduire. La déforestation serait donc responsable du déclin de la moitié des espèces d’oiseaux menacées, soit 734 d’entre elles, d’après BirdLife.
Espèces invasives, braconnage et changement climatique
Parce qu’elles affectent la moitié ou plus des espèces en danger, l’agriculture et la déforestation arrivent en tête des principales menaces qui pèsent sur les oiseaux. Mais d’autres facteurs contribuent également à leur disparition. Les espèces invasives comme les rongeurs, les moustiques porteurs de la malaria aviaire et les animaux domestiques à l’instar des chats, chiens, vaches et cochons touchent ainsi 578 espèces menacées, soit 39 % du global. Une tendance particulièrement vraie dans les îles où l’introduction de nouvelles espèces a favorisé le déclin de nombreuses autres. Autre danger : la chasse et le braconnage, qui concernent 517 espèces, soit 35 % des oiseaux menacés. En volume, les pays où l’on tue illégalement le plus d’oiseaux en danger sont l’Italie (5,6 millions par an), l’Egypte (5,5 millions), la Syrie (3,9 millions), le Liban (2,6 millions) et Chypre (2,3 millions). Le changement climatique pèse lui aussi sur plus d’un tiers des espèces menacées. D’autres menaces existent dans une moindre mesure, comme les incendies, la pollution, les perturbations humaines diverses (construction de barrages, conflits armés, activités de loisirs, etc.) ou encore la pêche au filet, responsable de la mort de 400 000 oiseaux chaque année et la pêche à la palangre qui tue 160 000 oiseaux par an, dont majoritairement des albatros et des pétrels.
texte par Jennifer Matas et infographie par Jérémy Bourgain
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