Le parc national d’Ujung Kulon, à l’extrémité de l’île de Java, en Indonésie, est le dernier refuge du rhinocéros de Java, l’espèce la plus rare de ces pachydermes. Le 26 avril dernier, le parc a annoncé la naissance de deux petits. Une excellente nouvelle qui fait suite à une autre plus tragique.
Naissance de deux jeunes à Ujung Kulon
En 2017, la surveillance de l’unique population de rhinocéros de Java avait permis d’estimer à 67 individus l’espèce. Mais en février 2018, les nombreux pièges photographiques positionnés dans le parc national ont montré les naissances récentes de deux petits comme les autorités du parc l’ont révélé fin avril. Situés dans des régions différentes du parc, que nous garderons sous silence, les deux jeunes ont pour mère Puri et Dewi, deux femelles bien connues des rangers du parc national. La gestation des rhinocéros dure environ 16 mois au bout desquels la femelle donne naissance à un unique petit qui restera à ses côtés pendant environ deux ans. C’est pourquoi les femelles ne peuvent avoir des petits que tous les 4 ans environ. Un rythme lent qui explique aussi que la population ait du mal à augmenter.
Décès de Samson, rhinocéros de Java adulte
En parallèle de ces naissances, le 23 avril au matin, Samson, rhinocéros mâle âgé d’une trentaine d’années, a été découvert sans vie sur la plage. L’animal, décédé trois jours plus tôt, possédait une marque caractéristique à l’oreille gauche qui a permis son identification. Son corps intact possédait encore la corne tant recherchée par les braconniers. La mort du mâle adulte serait donc tout à fait naturelle, le rhinocéros possédant une longévité d’environ 40 ans en milieu sauvage. Pour s’en assurer, des échantillons de peau et d’organes ont été prélevés afin d’écarter tout empoisonnement. Le vétérinaire de WWF Indonésie, qui a pratiqué la nécropsie, a finalement annoncé ce jour que l’animal était mort des suites d’une torsion de l’intestin. Une pathologie qui avait déjà causé la mort de cinq rhinocéros en 1982 et d’un autre en 2003 d’après le site Mongabay.
Malheureusement, les responsables du parc ont confirmé que Samson est décédé sans avoir eu l’opportunité de devenir père. Solitaires, les rhinocéros de Java ne recherchent la compagnie d’un autre membre de l’espèce qu’en période d’accouplement.
Les rhinocéros de Java seraient à présent au nombre de 68 dont 53 adultes (29 mâles et 24 femelles) et 15 jeunes dont les deux petits nouveaux de 2018 !
Moins de 100 individus, comment sauver l’espèce ?
Comme le marsouin du Golfe de Californie qui ne compterait plus que 12 spécimens au monde, plusieurs espèces animales sont très proches de l’extinction. Si le nombre d’individus ne permet pas seulement de juger si une espèce est menacée ou non (à ce sujet lire notre article sur la différence entre espèce rare et espèce menacée), dans le cas du rhinocéros de Java, le déclin est ancien mais régulier. Il s’agissait autrefois de l’espèce la plus répandue des rhinocéros asiatiques mais braconnage, déforestation et éruptions volcaniques lui ont laissé peu de répit. Comme pour la panthère de l’Amour, la question s’est donc posée sur la meilleure méthode à employer pour sauver l’espèce : reproduction en captivité, création d’une réserve protégée…?
Pour le vaquita, la première solution a été tentée et s’est soldée par la mort d’une femelle seulement 24 heures après sa capture, mettant ainsi un terme au projet du VaquitaCPR. Pour la panthère de l’Amour, la « Terre du léopard » a été créée semble-t-il avec succès puisque la population a aujourd’hui triplé. Mais que faire pour le rhinocéros de Java ? Comme le marsouin du Pacifique, l’espèce ne tolère pas la captivité et décède rapidement, et la création en 1980 du parc national d’Ujung Kulon ne semble pas avoir permis à l’espèce de croître mais seulement de stagner ce qui, dans les faits, est déjà une (petite) victoire.
Les naissances de ces deux petits rhinocéros en parallèle de la découverte du corps du vieux mâle permettent d’espérer que le taux de natalité finisse par surpasser celui de mortalité.
par Cécile Arnoud
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