Les tortues marines peuplent les océans depuis 150 millions d’années et sont, en quelque sorte, les derniers témoins d’un passé très lointain. Mais aujourd’hui, elles sont pour la plupart au bord de l’extinction. Leur avenir est en effet compromis par plusieurs menaces, aussi bien en haute mer que sur terre lorsqu’elles s’y rendent pour pondre leurs oeufs.
Des espèces en voie de disparition
Parmi toutes les espèces de tortues marines qui existent dans le monde, la quasi-totalité est menacée de disparition. Quatre grandes menaces pèsent sur elles :
- La pêche : même si ce ne sont pas les tortues marines qui sont visées, elles se retrouvent bien souvent prises dans des dispositifs comme les filets dérivants, les palangres ou les filets droits. WWF estime que chaque année, ce sont plusieurs centaines de milliers de tortues marines qui se retrouvent ainsi piégées et meurent dans des captures accidentelles.
- La prédation et le braconnage des oeufs : une tortue marine atteint sa maturité sexuelle a un âge très avancé, entre 10 ans pour les plus précoces et jusqu’à 40 ans pour les moins pressées. Quand on sait que les chances de survie d’un bébé tortue après éclosion sont seulement de 1 sur 1 000, on imagine les difficultés pour renouveler les populations sauvages. Les oeufs et les bébés sont en effet des proies faciles pour les oiseaux marins mais aussi des espèces domestiques comme les chats et les chiens. Les oeufs peuvent aussi être la cible des braconniers, tout comme les femelles, en position de faiblesse lorsqu’elles pondent.
- L’urbanisation des plages : pour se reproduire, les tortues marines doivent pondre sur la terre ferme. Mais les sites de nidification viables se réduisent comme peau de chagrin. De plus en plus, les littoraux se transforment avec la construction de routes et d’habitations.
- La pollution : les déchets plastiques rejetés à la mer constituent également une menace sérieuse pour les tortues marines. La plupart se nourrissent de méduses, qu’elles confondent souvent avec un sac plastique dérivant. Lorsqu’elles l’ingèrent, elles meurent étouffées. Les filets fantômes, laissés à la dérive par des pêcheurs, sont aussi dangereux puisqu’ils entravent les animaux marins, les empêchant de se nourrir, de nager ou de respirer.
Les espèces de tortues marines
Toutes appartiennent à l’ordre des Chéloniens mais elles se séparent en deux grandes familles : celle des Dermochélyidés – composée uniquement de la tortue luth – et celle des Cheloniidés – comprenant les sept autres espèces. Au total, il existe sept ou huit espèces de tortues marines, selon les classifications.
La tortue luth (Dermochelys coriacea)
Il s’agit de la plus grande tortue marine au monde, certains spécimens pouvant peser plus de 900 kilos, la moyenne se situant toutefois aux alentours de 400 kilos pour une taille oscillant entre 1,50 et 2 mètres. En plus de sa taille imposante, on la reconnaît à sa carapace atypique non pas composée de plaques mais plutôt d’une peau à l’aspect cuir. Celle-ci est sillonnée par des sortes de crêtes au nombre de sept. La tortue luth se nourrit majoritairement de méduses et de petits mollusques. Elle vit dans tous les océans de la planète et est connue pour effectuer de longues migrations s’étalant sur plusieurs mois. En revanche, elle préfère toujours les plages des tropiques pour nidifier. L’espèce est vulnérable à l’extinction (VU) selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).
La tortue imbriquée (Eretmochelys imbricata)
De taille bien moins grande que la tortue luth, la tortue imbriquée mesure une fois adulte entre 65 et 85 cm pour un poids moyen compris entre 45 et 75 kilos. Elle doit son nom à la disposition de ses écailles qui se chevauchent les unes sur les autres contrairement aux autres tortues marines. Eretmochelys imbricata nage dans des eaux chaudes, claires et relativement peu profondes. Voilà pourquoi on la trouve principalement dans des récifs, des baies, des estuaires ou des lagons proches des côtes. Gravement menacée par le commerce des écailles de tortues, la tortue imbriquée est aujourd’hui une espèce en danger critique d’extinction (CR). Au cours du dernier siècle, près de 80 % de sa population aurait disparu.
La tortue de Kemp (Lepidochelys Kempii)
Cette espèce est probablement la tortue marine la plus menacée au monde. Dans les années 1980, quelques centaines de femelles seulement ont été observées en train de nidifier, laissant présager le pire pour l’avenir de l’espèce. Il semblerait que la population sauvage se soit quelque peu rétablie, il n’empêche que les menaces continuent d’exister. L’espèce est donc logiquement classée « en danger critique d’extinction » (CR) par l’UICN. Elle se distingue par sa petite taille – son poids moyen adulte est de 45 kilos –, sa carapace arrondie et la forme de son bec similaire à celui d’un perroquet. La tortue de Kemp est carnivore et mange majoritairement des poissons, des méduses et de crabes. Elle vit uniquement dans le golfe du Mexique et le long de la côte est des Etats-Unis.
La tortue verte (Chelonia mydas)
Aussi appelée tortue franche, cette tortue marine détient le record de la maturité sexuelle : elle ne l’atteint en effet qu’entre 26 et 40 ans, ce qui est très long. Une telle attente avant de pouvoir se reproduire est un sérieux désavantage pour lutter contre l’extinction de l’espèce. D’autant qu’elle est classée « en danger » (EN) par l’UICN. La tortue verte vit généralement des eaux tropicales des océans Pacifique, Indien et Atlantique. Elle est herbivore et se nourrit uniquement d’algues et d’herbe, sauf pendant sa croissance où il lui arrive de manger également des méduses, des éponges et des mollusques.
La tortue caouanne (Caretta caretta)
Cette espèce de tortue marine est la plus commune en mer Méditerranée. Elle apprécie les eaux tempérées et subtropicales de façon générale, et s’observe également dans le nord-ouest de l’Atlantique. La tortue caouanne est carnivore. Dotée de mâchoires puissantes, elle est capable de briser les carapaces de gros crustacés comme les crabes et de mollusques réputés inaccessibles comme les lambis et les bénitiers. A l’instar des autres tortues marines, la tortue caouanne n’atteint la maturité sexuelle que tardivement, vers l’âge de 35 ans. L’espèce est classée « vulnérable» (VU) par l’UICN.
La tortue de Ridley ou olivâtre (Lepidochelys olivacea)
Cette espèce est la plus petite de toutes les tortues marines avec une taille adulte ne dépassant pas les 75 cm. Sa carapace en forme de cœur arbore une couleur olive, ce qui lui vaut aussi le nom de tortue olivâtre. Comme sa cousine la tortue verte, la tortue de Ridley nage dans les eaux tropicales des océans Pacifique, Indien et Atlantique, à l’exception des Caraïbes. Ses sites de nidification favoris se trouvent au Mexique, au Costa Rica et en Inde. L’UICN classe l’espèce en « vulnérable » (VU) sur la liste rouge des espèces menacées.
La tortue verte des Galápagos (Chelonia agassizii)
Longtemps considérée comme une sous-espèce de la tortue verte, la tortue verte des Galápagos est aussi appelée tortue noire en raison de la pigmentation de sa carapace. Comme son nom l’indique, l’espèce est endémique des Galápagos, un archipel équatorien isolé situé dans le Pacifique. Toutefois, on peut l’observer ailleurs dans le Pacifique, cette tortue étant elle aussi migratrice.
La tortue à dos plat (Natator depressa)
Cette tortue marine australienne, en revanche, n’est pas une habituée des longues migrations. Elle s’établit toute l’année dans les eaux du nord et de l’est de l’Australie, principalement le long de la Grande Barrière de corail et ne se déplace que lorsqu’elle y est obligée. Elle se distingue également par sa carapace plate de couleur vert olive. Adulte, elle mesure entre 90 cm et 1,30 m et pèse entre 100 et 150 kilos. Omnivore, elle se nourrit essentiellement de concombres de mer, de mollusques, de crustacés et d’algues. L’espèce étant peu connue des scientifiques, il n’existe aucune donnée officielle quant à son degré de menace. On sait en revanche qu’elle subit les mêmes menaces que ses homologues.
Vidéo de Benoit Goniak et texte de Jennifer Matas
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