Cette question digne d’un baccalauréat de philosophie est en fait bien plus pragmatique qu’on ne le pense. Les termes « rare » et « menacé » sont trop souvent utilisés à mauvais escient ou comme des possibles synonymes. Or, il n’en est rien. Espèces Menacées fait le point sur la question.
Espèce rare et espèce menacée : Kesako ?
Par définition, le terme rare renvoie à une notion de faible volume quel que soit l’objet auquel il se rapporte, il évoque l’idée d’un individu, d’un fait ou d’une espèce non commune, peu fréquente. La menace en revanche n’évoque pas l’idée de faible volume mais celle d’un danger sous-jacent. Dans le cas d’une espèce menacée, le danger est bien entendu l’extinction ou dans une moindre mesure la disparition à l’état sauvage.
Pour autant, une espèce menacée est-elle toujours rare et inversement, une espèce rare est-elle forcément menacée ? Pour répondre à ces deux questions, rien ne vaut des exemples concrets.
Prenons deux espèces, le marsouin du golfe de Californie et l’escargot de Corse, tous deux classés en danger critique d’extinction sur la liste rouge de l’UICN. Selon les dernières études, il reste 30 individus du premier et 5000 du second. Pourtant tous deux sont considérés au niveau mondial comme proches de l’extinction. Autre exemple, la grande mulette, une moule d’eau douce française dont la population est d’environ 100 000 individus, et le guépard qui ne compte plus que 7100 spécimens en Afrique et en Asie. Saurez-vous devinez laquelle des deux espèces est classée « vulnérable » et laquelle est « menacée » ? Vous vous en doutez, il y a bien sûr un piège. C’est bien la grande mulette qui est la plus menacée des deux espèces, pourtant sa population est plus de dix fois plus importante que celle du guépard ! Une espèce rare peut donc être moins menacée qu’une espèce commune. Un paradoxe pourtant tout à fait logique. Un animal peut être rare du fait qu’il dépend d’un biotope ou d’un écosystème très particulier qui ne se retrouve nulle part ailleurs, ce n’est pas pour ça qu’il est menacé. C’est le cas de nombreuses espèces endémiques.
Les critères de l’UICN pour définir une espèce menacée
A l’intérieur d’une même catégorie, les différences de volumes sont parfois impressionnantes. Prenons l’exemple de deux espèces dites vulnérables. Il reste environ 26 000 ours polaires dans le monde mais son cousin le panda géant fait partie de la même catégorie UICN avec seulement 1 864 individus. Cette petite comparaison tend à prouver que ce n’est pas uniquement la notion de volume qui fait d’un animal, une espèce menacée.
Mais alors sur quels critères se basent l’Union International pour la Conservation de la Nature pour déterminer les niveaux de menaces ? Voici les 5 notions retenues :
- La réduction de la taille de la population sur une durée donnée
- Sa répartition géographique (zone d’occurrence ou zone d’occupation)
- Une population estimée à moins de X individus en déclin continu
- Une population estimée à moins de X individus matures
- La probabilité qu’une espèce s’éteigne à l’état sauvage dans les X années
Selon le degré de menace, les critères sont de plus en plus restrictifs. Par exemple pour le critère C, X correspond à 250 individus pour une espèce en danger critique (CR), 2500 pour une espèce en danger (EN) et 10 000 individus pour une espèce vulnérable (VU). Même logique pour le critère D. Une espèce est classée CR quand sa population est inférieure à 50 individus matures, EN quand elle est inférieure à 250 et vulnérable pour 1 000 individus.
Ainsi, les girafes, au nombre d’environ 97 562, sont classées vulnérables selon le critère A car elles ont décliné de 36 à 40 % en 30 ans. Les tortues rayonnées, fortes d’une population de 6 millions d’individus, sont en revanche considérées comme en danger critique d’extinction, bien que plus nombreuses que les girafes. L’espèce remplit les critères A et E. La tortue rayonnée a en effet disparu de 40 % de son aire de répartition et sa population a baissé de 80 % en 100 ans. A son rythme actuel de déclin, les scientifiques estiment que son extinction se produira avant 45 ans.
Ce qu’il faut bien comprendre, c’est qu’en cas de menace nouvelle, comme l’introduction d’une espèce invasive, les animaux rares et/ou endémiques sont les plus menacés. S’ils n’ont pas la possibilité de migrer vers un autre habitat ou d’évoluer pour contrer le nouveau prédateur, l’espèce rare peut alors tout simplement disparaître.
4 Réponses to “Une espèce rare est-elle toujours une espèce menacée ?”
26.09.2020
Gnan MAMYMerci pour votre recherche. Je peux être un membre de votre institution. car ma formation de basse c’est environnement et actuellement je candidat au master option Conservation et développement de la biodiversité a l’université de N’Zérékoré/R.Guinée
09.03.2018
christianParfait, merci bcp
07.02.2017
gautier laurentBonjour, si je sais lire une espèce rare n est pas obligatoirement une espèce menacée…une espèce peut être rare par l’endroit ou les conditions dans laquelle elle vit et si son écosystème n est pas foncièrement en danger elle reste une espèce rare par contre une espèce menacée l est par l évolution dans le temps de sa population , la restriction de ses lieux de reproduction,l urbanisation civile ou agricole de ses lieux de résidence,la chasse ou la prédation naturelle, l évolution industrielle et les changement climatique .
07.02.2017
Espèces MenacéesVous avez tout compris Laurent 😉