Un parfum d’incompréhension flotte en Australie : alors que ses propres experts l’ont mis en garde, le gouvernement de la Nouvelle-Galles du Sud (sud-est du pays) vient de créer des réserves pour koalas qui ne correspondent pas à l’habitat naturel de l’espèce.
0,2 % de l’habitat du koala protégé
Le koala, espèce emblématique de l’Australie qui constitue son unique habitat sur Terre, est menacé. Dans l’Etat de la Nouvelle-Galles du Sud, un tiers de sa population sauvage a disparu ces trente dernières années et son avenir ne semble guère plus réjouissant. D’ailleurs, l’espèce est répertoriée sur ce territoire comme étant « vulnérable à l’extinction ». Elle est donc incluse dans la loi de 1999 sur la protection de l’environnement et la conservation de la biodiversité du Commonwealth. De quoi rendre la mise en place de mesures visant sa protection plus que souhaitable. Sauf si cela s’avère parfaitement inutile, comme le dénoncent aujourd’hui bon nombre d’écologistes.
En cause, le plan d’action du gouvernement de la Nouvelle-Galles du Sud en faveur de la sauvegarde du koala, décidé en mai 2018 et rendu public le 28 septembre. Celui-ci révèle que 45 millions de dollars ont été engagés avec comme mesure phare la création de réserves protégées. L’objectif : créer des espaces où les marsupiaux pourront vivre en toute sécurité, à l’abri des bulldozers qui abattent ailleurs sur l’île les arbres essentiels à leur survie. Le hic, c’est que les zones délimitées par les pouvoirs publics ne correspondent pas à l’habitat réel des koalas. Pire, cette décision a été prise en connaissance de cause puisque les experts du gouvernement avaient averti que seul 0,2 % de l’habitat réel de l’espèce était couvert par cette mesure.
24 000 hectares de réserves pour « presque rien »
« Ils ont créé 24 000 hectares de réserves qui ne feront presque rien pour sauver le koala, s’insurge Susie Russell, vice-présidente du conseil de l’environnement de la côte Nord dans les colonnes du Daily Examiner. S’ils avaient protégé à la place les 22 000 hectares cartographiés par le Bureau de l’environnement et du patrimoine, ils auraient donné aux koalas une chance réelle de survivre. » Même son de cloche du côté du Dr Oisin Sweeney, membre de l’Association des parcs nationaux de la Nouvelle-Galles du Sud. « La stratégie du gouvernement, c’est d’avoir des réserves de koalas sans koalas. Cela ne peut pas fonctionner. Pour protéger ces animaux, nous devons protéger leur habitat ainsi que les voies pour relier les différents groupes entre eux, [l’aire de répartition des koalas étant très fragmentée, NDLR] », détaille-t-il pour SBS News.
L’extinction d’ici 2050 ?
La situation est d’autant plus préoccupante que depuis un peu plus d’un an, la déforestation a repris de plus belle dans la Nouvelle-Galles du Sud. La faute à l’abolition en août 2017 d’une loi qui protégeait ces forêts. WWF Australie et le Nature Conservation Council ont révélé dans un rapport publié début septembre 2018 qu’en l’espace d’une année seulement, l’Etat de la Nouvelle-Galles du Sud avait défriché plus de 5 200 hectares de forêts où vivent les koalas. Pour donner un ordre d’idée, cela représente 14 terrains de football. D’après le biologiste Martin Taylor, auteur du rapport, le koala pourrait disparaître de la Nouvelle-Galles du Sud d’ici 2050 si les rythmes de défrichage restent inchangés. En attendant, le conseil de l’environnement de la côte Nord appelle Gladys Berejiklian, actuelle Premier ministre de la Nouvelle-Galles du Sud, à instaurer un moratoire afin d’empêcher tout déboisement dans les forêts où vivent les koalas. L’organisme demande également que des engagements soient pris sur le long terme pour la conservation de l’espèce. Aujourd’hui, il resterait moins de 20 000 koalas dans cette partie de l’Australie.
par Jennifer Matas
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