Classé en danger critique d’extinction, Canis rufus, le loup roux ou rouge est une espèce endémique des Etats-Unis. Alors qu’en 2018 nous vous parlions de 40 animaux dans la nature, il en resterait deux fois moins en 2020. Alors qu’elle est au bord de l’extinction, la conservation de l’espèce fait débat outre-Atlantique entre les propriétaires terriens et les pro-loups. Faute d’accord, l’espèce pourrait tout simplement s’éteindre d’ici 2023.
Le loup rouge, une espèce déjà presque éteinte à l’état sauvage
Le destin de Canis rufus – le loup rouge ou loup roux – espèce indigène des Etats-Unis est de plus en plus sombre. En milieu sauvage, il reste neuf animaux de manière certaine, suivis par collier GPS, et une dizaine supposée. Mais aucune naissance n’a pu être observée sur ces deux dernières années. Il s’agit de l’un des mammifères les plus menacés au monde mais, contrairement à son cousin le loup d’Abyssinie qui a lui aussi failli disparaître, la loi ne protège pas Canis rufus.
Dans les années 1960, des battues légales ont causé de grands dommages chez l’espèce. Il y a peu encore, l’US Fish & Wildlife Service (USFWS) autorisait les propriétaires terriens à abattre un loup rouge si celui-ci pénétrait leurs terres. Une mesure désavouée par un juge fédéral en 2018, mais qui fait toujours débat puisque l’administration Trump a proposé mi-2019 de restreindre de 10 % l’aire de répartition protégée du loup roux et de légaliser à nouveau les abattages en dehors de cette zone.
Pourtant, en 1980 le loup rouge avait déjà été déclaré éteint à l’état sauvage par l’administration américaine (et non par l’UICN) avant d’être réintroduit une première fois. En effet, ce cousin plus petit du loup gris fait l’objet d’un programme d’élevage en captivité dont 14 loups prélevés en milieu sauvage sont les fondateurs. Les premières réintroductions ont débuté en 1987 dans la réserve nationale de faune d’Alligator River, dans le nord-est de la Caroline du Nord. Mais l’USFWS a cessé en 2014 ses relâchés bien que la population de loups roux nés en captivité soit de 250 spécimens en 2020.
La question épineuse des réintroductions
Le gouvernement américain a fait l’objet de plusieurs plaintes de la part d’institutions de protection de la faune. L’un des principaux reproches semble être l’arrêt des réintroductions de loups roux en milieu sauvage alors même que ceux-ci se reproduisent très bien en captivité.
Principaux opposants à ces réintroductions, les propriétaires terriens de Caroline du Nord s’appuient sur le fait qu’il n’existerait plus aujourd’hui de spécimen de Canis rufus pur. En effet, les loups rouges sont connus pour s’être beaucoup reproduits avec les coyotes. Pour les opposants aux loups, l’espèce n’a donc plus à être protégée puisqu’elle n’existe déjà plus. Pour vérifier ce point, le Congrès américain a commandé une étude aux Académies nationales des sciences, de l’ingénierie et de la médecine américaines qui ont confirmé en mars 2019 que le loup rouge est bien toujours distinct génétiquement du coyote. Afin d’éviter toute hybridation, la stérilisation des coyotes pénétrant sur les terrains privés pourrait être remise en place après avoir été un temps abandonnée.
Autre argument avancé contre le relâcher de nouveaux individus en milieu sauvage, le manque de territoire. Les loups sont des animaux territoriaux et ont besoin de parcourir de grandes distances. Or, l’administration semble prétendre que la Caroline du Nord a atteint son quota maximum d’individus. Un argument qui laisse pantois les pro-loups qui ne comprennent pas que l’USFWS ne recherche pas de nouveaux sites de réintroduction. Dans un rapport publié en 2019, le Centre pour la Diversité Biologique a identifié cinq sites potentiels de réintroduction qui, selon lui, pourraient accueillir un total de 500 couples reproducteurs de loups rouges. Ces sites sont dispersés parmi les terres publiques du sud-est dans des États comme l’Alabama, l’Arkansas, la Floride, la Caroline du Nord, la Virginie et la Virginie occidentale.
L’absence de plan national d’actions : une question politique
Vous l’aurez compris, aux Etats-Unis la grogne monte contre l’absence de mesures de l’administration pour sauver une espèce endémique. Chris Lasher, coordinateur du programme d’élevage en captivité des loups roux, explique :
« Les gens voient un pygargue à tête blanche voler au-dessus de leur tête et ressentent cette sensation « Wow, c’est un pygargue à tête blanche ». Je veux que les gens ressentent la même chose à propos du loup rouge américain. Lorsque plus de gens éprouveront ce sentiment de fierté, c’est le jour où les programmes de conservation auront réellement une chance. »
Le principal sujet d’incompréhension : l’absence de plan national d’actions pour sauvegarder Canis rufus. L’ancien plan de conservation de l’espèce date de 1990 et, depuis, aucune ligne de conduite n’a été donnée au niveau national. Officiellement, le gouvernement y travaille et échoue à établir une politique commune. Mais pour les associations de protection de la faune, il s’agirait de la preuve que la volonté de l’administration n’est pas de protéger l’espèce mais au contraire de la laisser s’éteindre. Comme l’explique Perrin de Jong, avocat au Centre : « Refuser de publier les courriels de l’agence ne fait qu’alimenter nos pires soupçons selon lesquels l’administration a travaillé en secret pour créer un plan d’extinction du loup rouge. »
Une situation inacceptable pour les pro-loups et notamment le Centre pour la Diversité Biologique qui a déposé en novembre 2018 une action en justice pour forcer l’administration Trump a publié ses emails prouvant qu’elle travaille bien à l’établissement d’un nouveau plan d’actions. Acculé par la justice, l’US Fish & Wildlife Service a jusqu’au 28 février 2023 pour finaliser sa feuille de route pour le rétablissement d’une population viable de loups rouges. Malheureusement, à cette date, il pourrait déjà être trop tard pour les derniers animaux encore en milieu sauvage.
3 Réponses to “Aux Etats-Unis, le loup roux a-t-il encore un avenir ?”
24.05.2022
Edouard genoisejuste laisser les loups roux tranquille pour leur survie
et aussi de laisser leur habitat tranquille
10.02.2021
GoffauxIl leur faudrait plus d’espace que les gens arrêtent de diminuer leur espace de vie peut être faire des parcs naturels
23.01.2021
Anne CapelSauvez les loups rouges.
Étendre les forets, limiter les habitats humains