Début 2019, un nouveau défi a animé les réseaux sociaux du monde entier : le « 10 years challenge ». Son principe : poster une photo de soi aujourd’hui et une autre prise il y a dix ans pour voir l’évolution. D’un phénomène viral plutôt futile, les défenseurs de l’environnement en ont fait une occasion d’alerter le grand public, reprenant le 10 years challenge à leur compte.
Fonte des glaces, déforestation massive, pollution… Les problématiques environnementales sont malheureusement légion. L’une d’elles nous tient particulièrement à cœur chez Espèces Menacées, raison pour laquelle nous avons choisi de participer nous aussi à ce mouvement. Il s’agit de la disparition accélérée de la faune sauvage.
Sixième extinction de masse
En 2015, le monde apprenait – grâce à une étude scientifique des universités de Stanford, Berkeley et Princeton – qu’il vivait la sixième extinction de masse et que l’Homme en était le responsable. Le rythme de disparition des espèces serait en effet 100 à 1 000 fois plus important que la normale. D’autres travaux, publiés en 2017 ajoutent que la fin de l’Holocène – nom de l’époque géologique actuelle – pourrait être sous-estimé. Car en plus de l’extinction croissante des espèces animales et végétales, les espèces qui se portaient plutôt bien jusqu’à présent sont, elles aussi, de plus en plus nombreuses à voir leur population décliner, tout comme leur aire de répartition.
Un déclin si rapide qu’il est visible à l’échelle d’une vie, voire même d’une décennie seulement. Il n’a par exemple fallu que sept ans pour que 95 % des vautours d’Asie du Sud disparaissent.
Décimée par un parasite identifié en 2016, la grande nacre de Méditerranée est elle aussi en train de s’éteindre à vitesse grand V. Elle aurait déjà quasi disparu des côtes espagnoles et l’extinction se répand ailleurs dans le bassin méditerranéen sans que les scientifiques ne trouvent pour l’instant de parade.
Encore plus rapide en Australie, la chaleur a tué 23 000 chauves-souris en deux jours seulement. Soit un tiers de toute la population australienne de l’espèce ! Maladie, changement climatique, braconnage intensif, pollution, urbanisation… Les menaces qui pèsent sur la faune ne manquent pas.
Plus de 26 500 espèces menacées
Pourtant, il y a urgence. Qui sait si, d’ici dix ans, certains animaux que nous pensions aller bien ne succomberont pas à l’une de ces menaces à l’action si rapide. Aujourd’hui, 26 500 espèces d’animaux et de végétaux sont menacées d’extinction. Et il ne s’agit là que des espèces référencées par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Dans le détail :
- 40 % des amphibiens sont menacés de disparition
- 34 % des conifères
- 33 % des coraux
- 31 % des requins et des raies
- 25 % des mammifères
- 14 % des oiseaux.
Bien d’autres – 30 % des espèces de vertébrés notamment – voient leur population décliner mais ne sont pas pour autant classées par l’UICN en tant qu’espèces menacées.
Et dans dix ans ?
A ce rythme, l’état de la biodiversité s’annonce sous de mauvais auspices dans les prochaines années. Déjà deux espèces de vertébrés disparaissent tous les ans dans le monde et un grand nombre d’animaux et végétaux sont en danger critique d’extinction, dernière étape avec la disparition à l’état sauvage. C’est le cas par exemple de la tortue imbriquée dont la population a chuté de près de 90 % au cours des 100 dernières années, sous le poids du commerce d’écailles de tortues et du changement climatique. D’ailleurs, toutes les tortues marines sont menacées et disparaissent des océans.
Un sort similaire s’acharne sur l’orang-outan victime, quant à lui, des déforestations intensives en Indonésie, au profit de projets miniers ou de plantations de palmiers à huile. Les trois espèces d’orangs-outans – l’orang-outan de Sumatra, l’orang-outan de Bornéo et celle découverte en 2017, l’orang-outan de Tapanuli – sont en danger critique d’extinction. Or d’après Greenpeace, 25 de ces grands primates meurent chaque jour à cause de la déforestation. Que restera-t-il d’eux et de leur habitat naturel – les forêts de Sumatra et de Bornéo – dans dix ans ?
Les oiseaux, eux aussi, sont de plus en plus en danger. Les vautours notamment, comme évoqué plus haut, mais aussi le groupe des perroquets et perruches avec près d’une espèce sur trois qui est menacée. Parmi elles, la perruche de Latham, endémique d’Australie. L’UICN estime que 79 % à 95 % de sa population pourrait disparaître en l’espace de quarante ans seulement !
Avec 40 % de ses espèces menacées, le groupe des amphibiens est particulièrement concerné par les extinctions massives. En danger critique d’extinction depuis 2004, la mantelle dorée – originaire de Madagascar – pourrait elle aussi disparaître prochainement.
Enfin, grands oubliés de la conservation et pourtant ô combien nécessaires à la biodiversité, les insectes s’éteignent eux aussi… Mais dans le plus grand silence. Ces trente dernières années, 80 % des insectes d’Europe auraient disparu, d’après une étude publiée le 18 octobre 2017 dans la revue PLoS One. Parmi eux, les abeilles, des pollinisateurs naturels essentiels au maintien de l’écosystème.
par Jennifer Matas
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