Une forme nouvelle et plus pathogène du virus s’est propagée au sein de nombreuses populations d’oiseaux sauvages, partout dans l’hémisphère Nord. Les niveaux de mortalité ont atteint des records chez certaines espèces d’oiseaux marins.
Morts massives
Les corps d’oiseaux morts jonchent par milliers plusieurs sites côtiers où ils ont l’habitude de se retrouver à cette période de l’année. Certains, encore en vie, se tordent dans d’étranges positions avant de rendre l’âme. Même les oisillons n’y échappent pas, et beaucoup meurent dans un ultime battement d’ailes.
Ce spectacle désolant est malheureusement devenu courant dans l’hémisphère Nord au cours des derniers mois.
Les ravages de la grippe aviaire #birdflu sur la colonie de Fous de Bassan de Bass Rock (Ecosse). Comparaison des images prises par drone en 2020 et 2022. #Ornitho
Crédits : Scottish Seabird Centre pic.twitter.com/IyhrKGL7EG
— Guillaume Louernos (@CaluGuillaume) July 15, 2022
La raison : la propagation rapide d’une souche très virulente du virus H5N1, plus communément appelé « grippe aviaire ». Au journal britannique The Guardian, Gwen Potter, la responsable du programme du National Trust sur les îles Farne au large du Northumberland, en Angleterre, a confié :
« Le virus ne semble rien épargner, il emporte tout sur son passage. Nous avons récupéré des milliers d’oiseaux morts, et ce n’est que la pointe de l’iceberg. »
D’après les premières constatations, il semblerait que près de la moitié des oiseaux infectés par le virus en meurent. Certains spécialistes, qui ont étudié le virus de près, estiment que ce taux de mortalité pourrait même avoisiner les 100 %.
« La dernière forme de H5N1, qui serait apparue en 2014, présente plusieurs caractéristiques préoccupantes qui suggèrent que le virus est de mieux en mieux adapté pour infecter les oiseaux sauvages, alerte Birdlife. Le plus inquiétant, c’est sa transmissibilité apparemment plus élevée, entraînant une proportion beaucoup plus forte de populations d’oiseaux sauvages infectés et malheureusement mourants. »
Les oiseaux marins plus touchés
Difficile d’évaluer l’ampleur du désastre, tant il est étendu. Mais les scientifiques ont d’ores et déjà tiré la sonnette d’alarme pour plusieurs espèces d’oiseaux marins, dont la reproduction est plus compliquée – la maturité sexuelle arrivant plus tardivement – et qui pourraient donc avoir plus de mal à se rétablir d’une telle catastrophe sur le long terme.
D’autant que ces oiseaux s’agglutinent souvent les uns sur les autres pour pondre et élever leurs petits, ou tout simplement se nourrir. Des milliers d’entre eux se retrouvent en un même endroit et au même moment, créant une proximité qui a sans doute facilité la rapide transmission du virus.
Guillemots, pétrels, mouettes tridactyles, sternes et autres fous de Bassan sont hélas concernés. L’une des plus grandes colonies de ces derniers, située à Bass Rock en Ecosse, a été particulièrement touchée, mais également les populations d’Amérique du Nord, avec 20.000 fous de Bassan retrouvés morts au Canada. La grippe aviaire est également arrivée jusqu’à la réserve des Sept-Iles, en Bretagne, où les cadavres de fous de Bassan s’accumulent.
En mer du Nord, des milliers de sternes caugek ont trouvé la mort depuis juin 2022. Rien que dans l’hexagone, on estime que la grippe aviaire est responsable de la disparition d’environ 10 % de toute la population reproductrice française en l’espace d’une semaine. Aux Pays-Bas, c’est 80 % qui a disparu en quelques semaines. Les goélands argentés ont aussi été durement touchés. Et bien d’autres.
Répartition des foyers détectés d’influenza aviaire #grippeaviaire en juin – juillet 2022 chez l’avifaune sauvage. Il manque un foyer à Sélestat (67) hors carte ici. Données Veille Sanitaire Internationale (VSI) / Plateforme ESA. https://t.co/Zm0X7aPFFK pic.twitter.com/8mHU1yniz8
— Guillaume Louernos (@CaluGuillaume) August 10, 2022
Oiseaux de proie et charognards
Les oiseaux marins ne sont pas les seuls à affronter une mortalité massive en raison de la grippe aviaire. Presque toutes les espèces d’oiseaux de proie d’Europe occidentale ont été enregistrée avec le virus, dont certaines avec des conséquences désastreuses. Aux Pays-Bas, ce sont par exemple 30 % des faucons pèlerins qui sont morts en 2021.
« Contrairement aux vagues précédentes en Europe, les épidémies des deux dernières années se sont poursuivies tout l’été, suggérant que la grippe aviaire pourrait désormais être endémique chez les oiseaux sauvages du continent. Le virus est également capable d’infecter un éventail d’espèces beaucoup plus large que les formes précédentes », avertit Birdlife.
Au total, environ 400.000 oiseaux non avicoles – dont des oiseaux sauvages – seraient morts de la grippe aviaire au cours de la vague épidémique actuelle. C’est deux fois plus que lors de la précédente vague, en 2016-2017. Et le véritable chiffre est certainement bien plus élevé étant donné que tous les oiseaux ne sont pas testés ni retrouvés. Des millions d’oiseaux domestiques ont également été abattus en prévention.
1 réponse to “Grippe aviaire : mortalité sans précédent chez les oiseaux sauvages”
25.08.2022
Nathan HorrenbergerCe sont des milliers d’oiseaux morts qui ont été récupérés, pas des millions.