Une nouvelle étude dirigée par Henry Häkkinen de l’Université d’Exeter met en évidence un problème écologique crucial. Les chercheurs prédisent que les espèces naturalisées, celles qui ne sont pas indigènes mais qui se sont établies dans de nouveaux endroits, possèdent le potentiel de se propager encore plus loin dans des habitats appropriés à l’échelle mondiale.
L’étude explore la dynamique selon laquelle les espèces naturalisées, notamment les plantes, les oiseaux et les mammifères, ont réussi à étendre leur portée au-delà de leurs régions d’origine.
Qu’est-ce qui motive les invasions d’espèces ?
« Comprendre et prévoir la propagation des espèces introduites est l’un des principaux défis de conservation et écologiques du 21e siècle », ont écrit les auteurs de l’étude.
« Cependant, nous savons peu de choses sur les causes de l’augmentation rapide de l’aire de répartition introduite de certaines espèces, tandis que d’autres espèces restent dans de petites populations isolées des années après avoir établi des populations autosuffisantes. »
« Cette lacune majeure dans notre compréhension nous empêche de comprendre dans quelle mesure la propagation invasive est due aux caractéristiques de l’envahisseur ou de l’environnement envahi. »
Menace imminente pour les espèces naturalisées
Les chercheurs ont déclaré que la menace la plus imminente est posée par les milliers d’espèces naturalisées en dehors de leur aire de répartition d’origine et qui pourraient continuer à se propager beaucoup plus largement. « Cependant, il y a un manque surprenant d’attention accordée à la propagation potentielle d’espèces déjà naturalisées. »
« Sans comprendre ce qui a affecté la propagation de ces espèces dans le passé, nous ne pouvons évaluer ni quelles espèces sont susceptibles de se propager davantage, ni quelles régions géographiques seront les plus touchées. »
En se concentrant sur 833 plantes, oiseaux et mammifères naturalisés, les chercheurs ont identifié les zones terrestres les plus susceptibles à une future colonisation par ces espèces. Leurs conclusions mettent en évidence l’Amérique du Nord, l’Europe de l’Est et l’Australie comme des régions particulièrement vulnérables.
L’étude révèle un potentiel important de propagation des oiseaux naturalisés en Amérique du Nord, des mammifères en Europe de l’Est et des plantes dans ces deux régions ainsi qu’en Australie.
Propagation potentielle des espèces naturalisées
« La propagation potentielle des espèces naturalisées semble plus importante dans les régions déjà fortement envahies, c’est-à-dire l’Amérique du Nord, l’Australie et l’Europe. Cependant, les espèces déjà naturalisées menacent également des régions du monde considérées comme moins envahies », écrivent les auteurs de l’étude.
« En Amérique du Sud et en Afrique australe, environ 200 plantes naturalisées au niveau régional ont le potentiel de se propager largement – un nombre comparable à celui de l’Australie et de la Chine, qui ont historiquement supporté le poids des invasions biologiques. »
« Néanmoins, le potentiel de propagation des espèces naturalisées au niveau régional en Afrique subsaharienne et dans le nord de l’Amérique du Sud est inférieur à ce que l’on pourrait attendre du nombre élevé d’espèces naturalisées dans ces régions. Ceci est potentiellement encourageant compte tenu de l’augmentation récente du commerce régional et des infrastructures de transport dans ces régions, qui pourraient faciliter de plus en plus la propagation des espèces naturalisées.
Retard dans l’expansion
Malgré de nombreuses possibilités de croissance, bon nombre de ces espèces n’ont pas encore colonisé toutes les zones dotées d’un climat compatible. Ce retard dans l’expansion suggère que certaines espèces introduites pourraient ne pas devenir problématiques immédiatement mais pourraient présenter des risques après une période de décalage.
« Presque toutes les espèces que nous avons étudiées doivent encore se développer dans la plupart des zones qui leur conviennent sur le plan climatique, au sein des régions biogéographiques où elles se sont naturalisées. Et ce malgré un temps d’invasion considérable : 25 % sont établis depuis plus de 150 ans », ont noté les chercheurs.
Fusion invasive
Les experts ont également identifié les principaux facteurs influençant la propagation des espèces naturalisées. Ils ont constaté que l’histoire d’introduction d’une espèce, ses capacités de dispersion et la présence d’habitats appropriés sont plus critiques pour déterminer sa propagation que son habitat préféré ou ses interactions avec les espèces locales. Cette information est essentielle pour comprendre et prédire le mouvement des espèces non indigènes.
Une conclusion inquiétante de l’étude est le concept de « fusion invasionnelle ». Ce phénomène se produit lorsque plusieurs espèces introduites amplifient collectivement leur impact et leur capacité à s’établir dans un nouvel environnement, entraînant potentiellement des conséquences écologiques dévastatrices.
Même si bon nombre des espèces étudiées ont à elles seules un impact minime, leur effet collectif pourrait être bien plus nocif.
Implications futures des espèces naturalisées
« Les invasions d’espèces peuvent dévaster la biodiversité, l’agriculture et les moyens de subsistance. Il est donc inquiétant de constater qu’un si grand nombre d’espèces naturalisées semblent sur le point de se propager davantage », ont écrit les chercheurs.
« Mais il y a une lueur d’espoir que les invasions soient beaucoup plus limitées qu’elles ne pourraient l’être : les écosystèmes pourraient mieux retenir les envahisseurs que prévu, et une bonne gestion pourrait aider à endiguer la propagation. »
L’étude est publiée dans la revue PLoS Biologie.
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