La pollution plastique dans les océans du monde a augmenté de façon exponentielle au cours des dernières décennies et est devenue l’une des menaces les plus graves pour les organismes marins. Parce que les plastiques ne se décomposent pas naturellement, ils peuvent persister pendant de longues périodes et s’accumuler dans les environnements marins. On estime qu’entre 4,8 et 12,7 millions de tonnes de déchets plastiques pénètrent dans les océans chaque année et coulent au fond ou restent en suspension dans la colonne d’eau. Les courants entraînent les plastiques et les distribuent partout.
Des chercheurs du Centre Scientifique de Monaco et du Centre International des Récifs Coralliens de la République de Palau ont montré à quel point ces plastiques sont dispersés dans une étude récente publiée dans la revue PLOS UN. Les chercheurs se sont demandés si des microplastiques étaient présents sur et autour des îles de l’archipel des Palaos, une série d’environ 340 îles situées dans le nord-ouest de l’océan Pacifique. Cet archipel est isolé et éloigné de la plupart des zones urbaines et des sources de pollution, et possède certains des récifs coralliens les plus vierges au monde.
Les récifs coralliens sont des habitats riches en biodiversité qui servent de zones de reproduction, de reproduction et d’alimentation pour une variété d’organismes marins. Ils soutiennent également les activités humaines, telles que l’approvisionnement alimentaire et le tourisme. Cependant, les récifs coralliens sont déjà menacés par le changement climatique mondial qui a entraîné un réchauffement et une acidification des océans. La contamination par le plastique constituerait certainement un facteur de stress supplémentaire pour ces écosystèmes fragiles.
Les chercheurs ont choisi cinq sites d’étude situés à différents endroits de l’archipel. Leur objectif était d’étudier la pollution par les microplastiques et les microfibres dans les plages, les sédiments récifaux et l’eau de mer des principales îles des Palaos. Ils ont utilisé des méthodes d’échantillonnage simples pour démontrer qu’une telle recherche peut être réalisée sans technologie compliquée ou sophistiquée.
Les microplastiques sont des particules de plastique mesurant moins de 5 mm et polluent le milieu marin soit sous forme de microplastiques primaires (microfibres provenant des vêtements, microbilles ou granulés de plastique), soit sous forme de microplastiques secondaires formés à partir de la dégradation de morceaux de plastique plus gros par abrasion physique ou oxydation photochimique. Les microplastiques peuvent être ingérés par des organismes marins qui peuvent subir des blessures, une obstruction intestinale, la famine et la mortalité.
De plus, les microplastiques contiennent souvent des additifs toxiques, absorbent les polluants persistants et les métaux lourds présents dans l’eau de mer et sont colonisés par divers micro-organismes, notamment des agents pathogènes. L’ingestion de microplastiques peut ainsi transférer des polluants chimiques et des agents pathogènes aux organismes marins. De plus, les microplastiques peuvent se décomposer en fragments encore plus petits, appelés nanoplastiques (< 1 µm).
Les chercheurs ont utilisé des chaluts à zooplancton avec un maillage très fin pour les traîner dans l’eau à une profondeur de 10 cm sur chaque site. Les filets ont été soigneusement lavés à bord et les échantillons transférés dans des bouteilles. De retour au laboratoire, les échantillons ont été passés sur papier filtre et séchés avant d’être pesés.
Des échantillons de sédiments souterrains des récifs coralliens ont été collectés par des plongeurs qui ont gratté les 5 premiers centimètres de sédiments sur des sites d’échantillonnage à une profondeur d’environ 13 mètres. De même, les 5 premiers centimètres de sable ont été récupérés sur les sites d’échantillonnage des plages. Les échantillons ont été filtrés et traités avec des produits chimiques pour séparer les plastiques des sédiments. Les microplastiques ont ensuite été teints avec un colorant orange et comptés au microscope.
Les chercheurs ont découvert que des microplastiques et des microfibres étaient présents dans tous les échantillons analysés. Loin d’être protégées par leur relatif isolement, les îles Palaos abritaient une pollution plastique dans leurs récifs, leurs plages et l’eau de mer environnante. Dans l’eau de mer, l’abondance des microplastiques variait entre 0,01 et 0,09 particules par litre, tandis que dans le sable des plages, il y en avait entre 0,17 et 0,34 particules par gramme. L’analyse des sédiments du récif a révélé la présence de 6 à 12 particules de plastique par gramme, ce qui était supérieur à l’abondance de microplastiques dans les deux autres habitats.
Les chercheurs ont également été surpris de constater la présence de particules nanoplastiques dans tous leurs échantillons. Les nanoplastiques étaient plus abondants que les microplastiques, représentant entre 54,9 et 96,1 pour cent de chaque échantillon analysé. Et ce malgré le fait que l’équipement utilisé n’était pas conçu pour piéger les particules nanoplastiques et que leur abondance aurait donc été largement sous-estimée.
Ces résultats indiquent que la pollution par les microplastiques et les microfibres est omniprésente dans les environnements marins et que les récifs vierges des zones reculées ne sont pas protégés de ce phénomène. Les chercheurs affirment que la pollution microplastique des écosystèmes dépend davantage du mouvement des courants d’eau que de la proximité des activités anthropiques. Ils s’attendent à ce que les microplastiques soient susceptibles d’affecter la santé des organismes vivant dans les sédiments ainsi que des organismes filtreurs tels que les coraux.
« La pollution plastique dans les eaux et les sédiments des récifs des Palaos, qui ne sont pas un point chaud de l’activité humaine, doit être prise en compte dans les études futures, en particulier lors des vagues de chaleur qui, en combinaison avec la pollution plastique, peuvent particulièrement affecter les organismes des récifs coralliens », a écrit les chercheurs.
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Par Alison Bosman, Espèces-menacées.fr Rédacteur
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