Il s’appelle Beibei et pourrait marquer un tournant dans l’histoire de sa sous-espèce, la seule composée de marsouins d’eau douce au monde. En tout cas, c’est ce qu’espèrent les responsables du programme de reproduction artificielle lancé pour le marsouin aptère du Yangtzé (Neophocaena asiaeorientalis asiaeorientalis).
Premier marsouin aptère élevé artificiellement
Beibei est né en 2016. Depuis quatre ans, il vit dans un bassin conçu spécialement pour lui et a suivi une formation dédiée pour lui apprendre à se débrouiller seul une fois réintroduit dans la nature. Car c’est tout l’objectif de ce programme : une fois prêt, ce cétacé doit rejoindre le milieu semi-sauvage, et plus précisément un lac de la réserve naturelle « Baiji Dolphin » près de Shishou, en Chine.
A l’origine, cette réserve a été créée pour tenter de sauver le dauphin de Chine, aussi appelé dauphin du Yangtzé ou Baiji. Raison pour laquelle elle porte ce nom-là. Mais c’est finalement surtout pour la conservation du marsouin aptère du Yangtzé qu’elle sert aujourd’hui.
Un peu moins d’une trentaine de ces cétacés vivaient dans cette zone humide du bassin du Yangtzé (chiffres de 2010). Mais Beibei, qui les rejoint, est le tout premier élevé artificiellement dans le cadre du programme de reproduction lancé début 2016. L’arrivée de ce nouvel individu doit accroître la diversité génétique du groupe et donc aider à lutter contre la principale menace de cette population de cétacés dans ce milieu protégé : la consanguinité.
Le marsouin aptère, cétacé très menacé
Dans la nature, Neophocaena asiaeorientalis, le marsouin aptère, est gravement menacé. A l’échelle globale, l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) classe ce cétacé dans la catégorie « en danger » (EN) d’extinction. C’est pire pour la sous-espèce endémique du fleuve Yangtzé et ses lacs alentours puisqu’elle est considérée comme « en danger critique » (CR).
Les effectifs se sont effondrés au cours des dernières décennies. Selon une étude publiée en 2017, le déclin des populations s’accélère et l’espèce pourrait s’éteindre dans le Yangtzé d’ici une trentaine d’années. D’après le ministère de l’agriculture chinois, il resterait actuellement un millier d’individus dans la nature.
La principale menace qui pèse sur le marsouin aptère est la pêche. Pourtant, il n’est pas la cible directe des pêcheurs du Yangtzé et ne l’a jamais vraiment été – à l’exception d’une courte période dans les années 1950, précise l’UICN. En revanche, certaines techniques de pêche employées pour capturer d’autres espèces sont bien souvent à l’origine de fortes mortalités chez ce cétacé. D’autres pressions anthropiques s’exercent également, comme la pollution et la dégradation de ces milieux aquatiques par l’homme, via par exemple la construction de grands barrages comme celui des Trois Gorges.
A ne pas confondre avec le dauphin de Chine
Le marsouin aptère est l’un des deux cétacés à vivre dans le fleuve du Yangtzé. C’est la raison pour laquelle on le confond parfois avec le dauphin de Chine, également « en danger critique » d’extinction dans ces eaux. Certains scientifiques le considèrent même éteint depuis 2006.
Mais Neophocaena asiaeorientalis et Lipotes Vexillifer sont deux espèces distinctes. On peut d’ailleurs facilement les distinguer au premier coup d’œil, puisque ce marsouin n’a pas d’aileron dorsal, à la différence du dauphin de Chine. Raison pour laquelle il porte le nom de marsouin « aptère » qui signifie « sans ailes ».
Pour le sauver, la Chine a créé huit réserves naturelles dans le Yangtzé et alentours, notamment dans les lacs Poyang et Dongting. Elle a également mis sur pied un programme de reproduction artificielle qui compte aujourd’hui trois groupes d’élevage. Selon la presse chinoise, une centaine de groupes de marsouins aptères du Yangtzé existerait actuellement ex situ. Ensemble, ils permettraient la naissance d’une dizaine d’individus chaque année.
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