Présentation des saïgas
L’antilope Saïga est le symbole des steppes asiatiques. Il existe deux sous-espèces :
- Saiga tatarica tatarica : bien que proche de l’extinction, elle comprend la majorité de la population mondiale.
- Saiga tatarica mongolica : endémique de l’ouest de la Mongolie, cette sous-espèce est classée « en danger » depuis 2006.
C’est sur la première que portera notre fiche.
Saiga tatarica tatarica, aussi appelée la saïga russe, en opposition à la saïga de Mongolie, est en danger critique d’extinction depuis 2002. Ce classement n’est pas dû à la taille de la population mais à son déclin impressionnant. Depuis 1990, 95 % de la population a disparu. A une époque, il s’agissait pourtant de l’antilope la plus répandue du monde.
Population
Difficile de dire à combien se porte la population mondiale de saïgas ! Les bonnes années, elle peut augmenter de façon considérable, et les mauvaises peuvent voir s’effondrer près de la moitié de l’espèce.
Ainsi, entre 1990 et 1994, la population d’antilopes était stabilisée à environ un million d’individus dont plus de 800 000 au Kazakhstan. Cependant, cette année 1994 marque un tournant. Entre 1994 et 2002, on estime que l’espèce a perdu 95 % de son effectif en passant de 1,2 million de têtes en 1993 à moins de 100 000 en 2001. Depuis, l’espèce croît et décroît de manière importante selon les années. Elle a à nouveau subi une grosse perte en 2015 en passant d’environ 320 000 animaux à 120 000, les experts craignant plus que jamais pour la survie de l’espèce. Heureusement, en 2016 l’espoir semble renaitre et les hardes se repeuplent peu à peu.
Régime alimentaire
Comme toutes les antilopes du monde, les saïgas sont herbivores. Elles se nourrissent d’herbes, de graminées et d’arbustes.
Aspect physique
Cette antilope au physique atypique est reconnaissable très facilement grâce à son nez proéminent et mou qui ressemble à une trompe. Un appareil nasal très pratique pour la vie dans le désert ! En effet, le nez des saïgas filtre la poussière soulevée du sol afin qu’elle n’atteigne pas les poumons et, comme pour le nez humain, permet de refroidir ou au contraire de réchauffer l’air avant qu’il ne pénètre dans l’organisme.
Une femelle saïga mesure environ 70 cm au garrot et pèse autour des 28 kg. Il existe un dimorphisme sexuel important, le mâle possédant des cornes, pouvant peser le double de la femelle et être plus grand.
Leur pelage est marron en été avec le ventre et les pattes plus clairs mais, l’hiver, tout le corps est recouvert d’un manteau de poils épais de couleur beige pâle.
Localisation
Les saïgas vivent en troupeaux de taille impressionnante dans les steppes eurasiennes. Il existe quatre populations de Saiga tatarica tatarica : une en Russie et trois au Kazakhstan. Comme il s’agit d’une espèce migratrice, les antilopes descendent dans le sud en hiver et passent la frontière avec l’Ouzbékistan. En été, au contraire, elles remontent dans le nord. Les antilopes saïgas vivent dans les régions semi-désertiques mais ont besoin d’herbes pour se nourrir. Les hivers rudes qui gèlent la végétation les obligent à se déplacer sur des centaines de kilomètres.
Autrefois, les saïgas vivaient aussi en Chine, pays frontalier du Kazakhstan, mais aucun individu n’y a été vu depuis les années 1960.
Menaces sur la population de saïgas
Les antilopes saïgas possèdent bien sûr des prédateurs naturels comme les loups, les renards ou encore les aigles, qui s’attaquent surtout aux jeunes individus, mais aucun de ses animaux ne peut expliquer le déclin foudroyant de l’espèce. Pour cela, il faut chercher du côté de l’homme et de la maladie.
Braconnage
Comme celle du rhinocéros, la corne des saïgas est utilisée dans la médecine traditionnelle asiatique et vaut par conséquent très cher sur le marché noir. Le braconnage des mâles, les seuls à porter des cornes, a eu un impact important sur la répartition de la population de saïgas : le ratio sexuel actuel est de dix femelles pour un mâle.
Autre raison au braconnage, l’éclatement de l’URSS en 1991 a provoqué de graves difficultés financières dans les anciens pays de l’Union. La viande de saïga, alors espèce très répandue, est devenue très prisée. La chasse incontrôlée a provoqué une chute brutale de la population. A présent, cette menace est de plus en plus maîtrisée. En 2015, 107 cas de braconnage ont été identifiés.
Maladie
Les antilopes saïgas sont victimes de manière régulière de graves épizooties, des épidémies qui ciblent une espèce animale. La plus grave crise a lieu en 1984, 250 000 antilopes sont tuées. En 2010, en l’espace de 4 jours seulement, ce sont 12 000 antilopes qui meurent. Depuis, les choses s’étaient relativement calmées avec « seulement » une centaine de morts chaque année jusqu’en 2015, où plus de 200 000 bêtes succombent à la maladie entre mai et juin. A chaque fois, il s’agit de la même infection : la pasteurellose, une maladie infectieuse dont la mortalité atteint presque 100 %.
La bactérie coupable, « pasteurella multocida serotype B », se trouve naturellement dans les voies respiratoires des saïgas. Les spécialistes ne savent pas encore ce qui déclenche la maladie.
Efforts de conservation des antilopes menacées
Les saïgas sont protégées par la CITES grâce à leur inscription en annexe II en 1995. Leur commerce est donc réglementé et il est nécessaire d’avoir un permis spécial pour abattre une de ces antilopes. Cette mesure a presque permis de mettre fin au braconnage et au commerce de la corne de saïga.
Comme il s’agit d’une espèce migratrice, il est impossible de les réunir dans des parcs naturels ou des aires protégées. Contre les épizooties, les scientifiques manquent encore d’informations pour bien comprendre comment une bactérie naturellement présente dans le corps des animaux peut tuer 200 000 bêtes en quelques jours. Certains aimeraient vacciner les saïgas par aérosol mais le remède pourrait faire autant de dégât que le mal lui-même.
Pour sauvegarder l’espèce et lutter contre le braconnage, la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (CMS ou Convention du Bonn), a fait signer à tous les pays de l’aire de répartition des saïgas un protocole d’entente concernant la conservation, la restauration et l’utilisation durable de l’antilope : on l’appelle MoU (pour Memorandum of Understanding concerning conservation, restoration and sustainable use of the saiga antelope). Les priorités de ce traité sont : les mesures anti-braconnage, la conservation, la recherche et la surveillance de toute les populations de saïgas, ainsi que des mesures spécifiques pour les sous-populations.
Le CMS a confié à l’association Conservation Alliance Saiga la mise en œuvre du MoU et son suivi. L’alliance a été officiellement créée en 2006. Il s’agit d’un réseau de chercheurs et d’écologistes spécialistes des saïgas. Les membres viennent du Royaume-Uni, de Russie, du Kazakhstan, de Chine, de Mongolie ou encore d’Ouzbékistan. L’organisation remet des rapports aux pays signataires mais tient également informé le grand public de l’évolution de la situation de l’espèce. Elle a notamment créé un site internet, le Centre de ressources Saïga, qui constitue une base de données quasi-complète de tout ce qui est publié sur l’animal : études, photos, vidéos, etc.
Reproduction
Les saïgas constituent des hardes pouvant atteindre un millier d’individus. Chaque mâle possède son harem de femelles, jusqu’à 30 ! La saison de la reproduction débute en décembre. La gestation d’un petit dure un peu moins de 5 mois, de 140 à 150 jours. Les futures mères se rassemblent en plaine pour donner naissance et toutes les femelles mettent bas en même temps, en général la première semaine de mai. Les scientifiques ont remarqué que les épisodes d’épizootie de pasteurellose se déroulaient en général à ce moment, la promiscuité entre les mères et les nouveau-nés à cette période explique aussi comment l’infection peut tuer tant d’animaux en quelques jours à peine.
Les jeunes femelles donnent en général naissance à un unique bébé. Les femelles plus âgées ont davantage de jumeaux, voire des triplés.
Les saïgas ont un taux de reproduction élevé quand les conditions climatiques sont favorables. On estime que la population se renouvelle presque entièrement tous les quatre ans. C’est cette capacité à se multiplier rapidement qui a sans doute sauvé l’espèce jusque-là malgré plusieurs déclins fulgurants. Toutefois, le braconnage ne s’en prenant qu’aux mâles, la reproduction des saïgas pourrait devenir de plus en plus compliquée si la population masculine venait à baisser dangereusement.
En savoir plus
Attention au déterminant devant le nom « saïga » ! Une saïga est une antilope eurasienne menacée mais un saïga est un fusil semi-automatique créé par la Russie, sur le modèle d’une autre arme restée célèbre : la kalachnikov. Le second peut donc être utilisé pour tuer le premier !
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