
Ara glaucogularis de son nom scientifique est une espèce que l’on connaît peu. Endémique du nord de la Bolivie, il s’agit de l’un des perroquets les plus rares au monde. Son espèce est gravement menacée et l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) la classe « en danger critique d’extinction » (CR), dernier seuil avant la disparition à l’état sauvage. D’après les dernières estimations, il existerait environ 350 individus dans la nature. Un chiffre en hausse, l’ara à gorge bleue ayant frôlé l’extinction dans les années 1980.
Description de l’ara à gorge bleue
Caractéristiques physiques
L’ara à gorge bleue est un grand perroquet mesurant environ 85 cm à l’âge adulte pour un poids oscillant entre 600 et 800 g. Il n’existe pas de dimorphisme sexuel. Toute la partie supérieure de l’animal, à savoir le dos, le haut de la tête et de la queue, est de couleur bleu turquoise et la partie inférieure – qui comprend le ventre et le dessous de la queue – est jaune. On pourrait aisément le confondre avec son cousin le Ara ararauna, lui aussi bleu et jaune, mais on le différencie grâce à la tache bleue qui lui donne son nom et qui recouvre sa gorge, tranchant ainsi avec le jaune qui domine cette partie du corps. L’ararauna est également légèrement plus grand et sa queue plus épaisse qu’Ara glaucogularis. Quand on l’observe avec plus d’attention, on distingue que le bleu qui forme une couronne autour de sa gorge est plus sombre et celui de sa queue plus brillant. Le contour de ses yeux est, quant à lui, blanc zébré de traits bleu foncé et une peau rosée entoure son bec. Les yeux en eux-mêmes sont de couleur jaune pour les adultes et grise pour les juvéniles. Le cri de ce perroquet est strident, à la fois plus aigu et plus doux que celui d’A. ararauna.
Régime alimentaire
Ara glaucogularis trouve sa nourriture dans son environnement direct, riche en végétaux. Les savanes où il vit abritent en effet plus de 1 500 espèces de plantes, dont le palmier Attalea phalerata qui produit la noix motacú, son aliment préféré. Il lui faut parfois beaucoup de patience et d’acharnement pour réussir à la décortiquer et en extraire la chair, mais la mission se trouve facilitée par la puissance et l’agilité de son bec. Il lui arrive parfois de sélectionner des noix pas encore mûres pour boire le liquide qui se trouve à l’intérieur. L’ara à gorge bleue se nourrit aussi des fruits de l’Acrocomia aculeata, une autre sorte de palmier plus répandu dans les Caraïbes et le nord de l’Amérique latine. Il peut également consommer les fleurs de certaines plantes ou des graines pas encore arrivées à maturité.
Comportement
Ce perroquet bolivien vit généralement en couple ou en petit groupe de quelques individus. Le plus grand de tous se compose tout de même de 70 oiseaux ! Mais cela reste rare et les scientifiques qui l’ont découvert en 2012 supposent qu’il ne réunit que des oiseaux non reproducteurs.
Habitat et localisation
Ara glaucogularis est un oiseau endémique de la Bolivie. Il ne vit que sur un territoire bien précis de ce pays d’Amérique du Sud, dans les Llanos de Moxos aussi appelées les savanes de Béni, au nord-est. Il s’agit d’une immense zone humide rattachée au bassin amazonien, composée de vastes savanes tropicales où le climat alterne entre une période sèche d’avril à octobre et une saison des pluies de novembre à mars. Deux sous-populations se partagent ces terres : une au nord du côté du río Mamoré et une plus au sud, dans la province de Marabán, près de la localité de Loreto. Au total, l’aire de répartition de l’ara à gorge bleue s’étend sur environ 4 000 km².
Menaces
Près d’un tiers des perroquets sont menacés autour du globe et parmi eux, Ara glaucogularis fait partie des espèces les plus en danger. Il n’existe en effet plus que 350 aras à gorge bleue dans le monde. Sa population sauvage est extrêmement réduite et confinée à un petit territoire. Pendant des décennies, cet oiseau a subi de nombreuses menaces pesant sur sa préservation.
Le commerce d’animaux de compagnie
Ce perroquet a longtemps fait l’objet de convoitise. Sa beauté et sa rareté ont poussé de nombreux braconniers à s’intéresser à lui, motivés par l’appât du gain que la vente d’un seul de ces oiseaux pouvait représenter. Pendant toute la décennie 1970 et jusqu’au début des années 1980, le braconnage a constitué la principale menace sur sa survie dans la nature. C’est ce qui a décimé des populations entières. Aujourd’hui, l’ara à gorge bleue est inscrit à l’annexe I de la Cites, ce qui en interdit tout commerce international. L’exportation depuis la Bolivie vers un autre pays est illégale depuis 1984, ce qui a permis de réduire drastiquement son commerce. Pourtant, tout au long des années 1980, plus de 1 200 aras à gorge bleue auraient été capturés dans la nature et exportés ailleurs dans le monde pour être vendus comme animaux de compagnie. Des preuves avérées d’exportation illégale ont même été constatées jusqu’en 1997 et en 2010, les autorités ont saisi deux juvéniles qui ont ensuite été relâchés dans leur milieu naturel. Heureusement, aujourd’hui, le trafic illégal reste marginal et n’est plus considéré comme une menace, ont assuré en 2016 l’association Armonía et la fondation Parque Loro, en charge de la protection de l’espèce avec la World Parrot Trust.
La chasse
Le plumage d’Ara glaucogularis est sublime et rare, ce qui n’a pas échappé à certaines populations indigènes. Pendant longtemps, des peuples ont chassé ce perroquet afin de fabriquer des coiffes à partir de ses plumes. Elles étaient ensuite portées pour danser la Machetero, une danse traditionnelle. « Cela a probablement eu un impact dans certaines régions », écrit en 2012 Igor Berkunsky de l’Université de Buenos Aires. Depuis 1995, la fondation espagnole Loro Parque a investi plus d’un million d’euros pour sensibiliser les populations locales à la préservation de cet ara et construit des ateliers pour apprendre à fabriquer des coiffes à partir de plumes artificielles.
La forte mortalité des juvéniles
L’hécatombe provoquée par les captures massives de spécimens destinés au commerce des animaux de compagnie a été d’autant plus grave que l’ara à gorge bleue a plutôt du mal à élever ses petits jusqu’à ce qu’ils atteignent leur maturité. Et ce, pour plusieurs raisons que les scientifiques viennent tout juste d’identifier. Entre 2007 et 2012, ils ont surveillé 30 nids afin de déterminer les causes de cette reproduction difficile pour certains couples. Durant la période, 57 % n’ont donné naissance à aucun petit malgré des pontes, les problèmes arrivant généralement au moment de la période d’incubation. En cause : des maladies – surtout lorsque l’ara à gorge bleue partage les mêmes points d’eau avec d’autres oiseaux –, des parasites non dangereux pour les adultes mais mortels pour les petits, des abandons de la part des parents mais aussi la prédation sur les oeufs. Le toucan toco (Ramphastos toco), la buse échasse (Geranospiza caerulescens), le grand-duc d’Amérique (Bubo virginianus) et le caracara huppé (Caracara plancus) représentent en effet une menace pour les plus jeunes. Autre facteur à risque pour la reproduction de l’espèce : la consanguinité. Les populations se retrouvent en effet très fragmentées en raison de la perte de leur habitat naturel, les petits groupes restants souffrent d’un manque de renouvellement génétique avec l’arrivée de nouveaux individus, ce qui pourrait entraîner une baisse de la fertilité.
Efforts de conservation
L’ara à gorge bleue a fait l’objet de nombreuses mesures de préservation pour éviter sa disparition. Il faut dire qu’il y avait urgence : dans les années 1990, il existait moins d’une centaine de ces perroquets dans la nature. D’ailleurs, on la croyait éteinte à l’état sauvage jusqu’à ce qu’on la redécouvre en 1992. Grâce aux actions mises en place sur le terrain pour le protéger, sa population est désormais stable… mais entièrement dépendante des mesures de conservation.
Les actions de World Parrot Trust et d’Armonía
L’espèce a frôlé l’extinction, ce qui a poussé des associations à lutter pour sa préservation dans la nature. L’organisation World Parrot Trust, créée en 1989, s’est donnée pour mission de protéger les perroquets les plus menacés au monde. Aujourd’hui, elle pilote plusieurs programmes de conservation dans le monde et aide à la préservation de 66 espèces réparties dans 42 pays. La protection de l’ara à gorge bleue fait partie de ses priorités depuis 2002. L’organisme est rejoint dès 2003 par l’association de protection des oiseaux de Bolivie, Armonía, et la fondation espagnole Parque Loro pour mettre en place un plan d’action visant son rétablissement dans la nature. Un travail avec les propriétaires de terres où vivent certains aras à gorge bleue a notamment été engagé. Des accords ont par exemple été conclus pour mettre en place des dispositifs empêchant l’accès aux éventuels braconniers. Beaucoup ont également accepté que l’on plante des arbres fournissant de la nourriture à Ara glaucogularis et une campagne pour développer des nichoirs dans ces zones a débuté en 2004. La protection des nids est également primordiale pour assurer le renouvellement des populations. Il pouvait par exemple arriver qu’avec la saison des pluies, certains nids se retrouvent complètement inondés et les jeunes aras à gorge bleue noyés. La World Parrot Trust a ainsi recensé tous les nids dont les configurations pouvaient entraîner une telle catastrophe et créé des trous pour drainer le surplus d’eau ou, dans certains cas, des toits afin de protéger les oiseaux. Depuis 2008, plus aucun nid n’a été inondé. Grâce à ces différentes mesures, le nombre de juvéniles est aujourd’hui en hausse.

Un juvénile au centre de conservation construit en 2012 par la World Parrot Trust.
La réserve naturelle Barba Azul
Comme un prolongement de leur plan de conservation initié en 2003, Armonía a créé en 2008 avec l’aide de l’American Bird Conservancy la réserve naturelle Barba Azul, au nord du pays. Il s’agit de la première zone protégée dédiée à cette espèce en voie d’extinction. Sur 11 000 hectares, Ara glaucogularis peut se nourrir et évoluer en toute sécurité, sous l’œil vigilant des membres de l’association. Les oiseaux y évoluent avec les juvéniles de mai à octobre, après s’être reproduit ailleurs. Dix ans après son inauguration, Barba Azul Nature Reserve est déjà un succès : en 2017, 155 aras à gorge bleue ont été recensés sur un seul perchoir. Un record ! La quasi-totalité de la population sauvage des aras à gorge bleue vit dans cette réserve pendant une partie de l’année.
>> Rapport de mai 2018 sur les naissances à Barba Azul Nature Reserve
La réserve de Gran mojos
Une deuxième aire protégée dédiée à l’ara à gorge bleue et à d’autres espèces comme le jaguar et l’inia de Bolivie (un dauphin endémique de ce pays) a été créée début 2017 par la World Parrot Trust et des partenaires locaux. Il s’agit de la réserve de Gran Mojos, une zone de plus de 580 000 hectares qui recouvre 95 % de la surface de Loreto, une localité du département de Béni, et abrite une forêt primaire immense, s’étendant sur plus de 85 000 hectares jamais explorés ou presque par l’Homme. Un véritable paradis pour les espèces qui y vivent. Les chercheurs estiment que cette réserve contribuera à la protection de 35 % de la population sauvage d’aras à gorge bleue et de la moitié des couples reproducteurs.
Reproduction
Comme évoqué précédemment, la reproduction de l’ara à gorge bleue n’est pas évidente et la naissance de juvéniles dépend de nombreux facteurs. Une femelle pond entre un et trois œufs. Le couple reproducteur niche dans des cavités d’environ 30 cm de diamètre, plutôt profondes, souvent à l’intérieur de troncs au sommet de palmiers morts. Ara glaucogularis préfère en effet établir son nid dans des cavités verticales, en bois et bénéficiant d’une entrée plutôt large. Mais les parents se retrouvent parfois en compétition avec d’autres espèces d’oiseaux qui cherchent à établir leur nid dans les mêmes endroits. C’est le cas par exemple d’autres aras, de toucans, de pics mais aussi de chauves-souris. Raison pour laquelle des boîtes à nids correspondant parfaitement aux critères de l’ara à gorge bleue tout en protégeant les petits des prédateurs ont été placées un peu partout sur les sites de nidification identifiés.
A noter que la sous-population du nord s’accouple vers la fin de la saison sèche, de septembre à octobre, tandis que celle du sud attend le début des pluies, en novembre, pour se reproduire.
par Jennifer Matas
2 Réponses to “L’ara à gorge bleue”
30.04.2019
myralietres bon site je suis satisfaite 😉
17.04.2021
FlorenceTout à fait d’accord!