En matière de conflits Homme-faune, certaines zones géographiques comme l’Afrique, l’Asie et l’Amérique du Sud reviennent plus volontiers sur le devant de la scène. Certes, les décès provoqués par de grands herbivores ou carnivores y sont plus fréquents, bien que tout de même peu courants en comparaison de la mortalité liée aux maladies véhiculées par les moustiques par exemple. Cela s’explique par plusieurs facteurs comme le nombre d’animaux potentiellement dangereux, la densité de population dans les zones rurales plus élevée dans ces pays ou encore les formes d’agropastoralisme qui y sont pratiquées. Cela ne signifie pas pour autant que les pays européens aient mis un terme aux conflits Homme-faune.
L’extermination des grands carnivores…
Quelques décennies en arrière, l’Europe comptait elle aussi des grands carnivores sur son territoire. Loups, lynx et ours bruns peuplaient ces terres avant d’être exterminés par l’Homme. Seuls quelques groupes ont résisté, notamment en Europe de l’Est, mais des programmes de réintroduction sont en cours dans plusieurs pays. Si l’on se concentre sur le cas de la France, ces trois grandes familles de carnivores ont toutes disparu du pays à l’état sauvage du fait de l’activité humaine (déboisement, chasse, constructions d’infrastructures, etc.). Au début du 20ème siècle, il n’existe officiellement plus d’ours en France si ce n’est quelques individus dans les Pyrénées. Lorsque le dernier disparaît, il est décidé de faire venir des ours bruns d’Europe de l’est pour les introduire dans les Pyrénées. En 1996, deux femelles sont relâchées en Haute-Garonne, et un mâle les rejoint l’année suivante. Quant au loup, il a disparu de la France dans les années 1930 avant de faire son grand retour en 1992. Des canidés venus d’Italie ont en effet migré pour s’installer dans les Alpes maritimes. De nos jours, le loup a difficilement repeuplé les Alpes françaises et compte une population d’environ 360 individus en France (chiffre 2017).
… et leur difficile réintroduction et sauvegarde
Mais le retour des carnivores n’est pas vu d’un très bon œil de la part de beaucoup. L’ours et le loup font régulièrement l’objet de contestations du côté des éleveurs qui clament haut et fort leur opposition aux programmes de sauvegarde de ces espèces. Plus discret, le lynx est lui aussi un carnivore peu désiré dans nos montagnes. Réintroduit dans les années 1970-1980 dans l’hexagone, il vit très difficilement sa cohabitation avec l’Homme. Souvent percutés par des véhicules sur les axes routiers ou par des trains, les lynx ont connu en 2016 un fort taux de mortalité en France. « Plusieurs individus sont également victimes de braconnage », rappelle Thierry Billey, animateur du réseau franc-comtois de Férus, une association de protection et de conservation de l’ours, du loup et du lynx en France. Car le félin a mauvaise réputation : beaucoup craignent que sa présence ne nuise aux populations d’ongulés qu’il a l’habitude de chasser. « Mais c’est totalement faux, rappelle Thierry Billey. Dans le Jura, qui regroupe l’essentiel de la population française de lynx, on ne trouve en moyenne qu’1,2 lynx tous les 100 km², ce qui est très faible. Sachant qu’il ne lui faut qu’un ongulé par semaine pour se nourrir, le compte est vite fait », ajoute-t-il. Peu de chance en effet que le lynx extermine son garde-manger. « Il n’empêche que la plupart des gens manquent d’informations et sont peu sensibilisés. » Résultat, l’espèce est méconnue et mal-aimée. Dans les Vosges, où 21 lynx ont été réintroduits dans les années 1990, un seul serait encore présent. Et encore, il est absent des derniers relevés photographiques, ce qui pourrait laisser penser que l’espèce s’est éteinte dans cette partie de l’Hexagone.
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