L’hybridation entre reptiles est l’une des plus répandues et cause différents problèmes pour la sauvegarde d’espèces menacées.
L’iguane des Petites Antilles menacé par l’iguane commun
C’est le cas de l’iguane des Petites Antilles, reptile très menacé des Antilles françaises, dont il ne reste que deux populations dites « pures » génétiquement. « Parmi toutes les espèces d’iguanes qui existent dans le monde, toutes ne peuvent pas s’hybrider. Mais c’est le cas pour l’iguane des Petites Antilles et l’iguane vert », explique Fabian Rateau animateur des plans nationaux d’actions (PNA) tortues marines et iguanes des Petites Antilles pour l’ONF.
Le problème, c’est que les hybrides des deux espèces deviennent si nombreux qu’ils chassent l’iguane des Petites Antilles de sa niche écologique et diminuent les chances pour l’espèce de conserver son génome intacte. Aujourd’hui, il est plus facile de trouver des iguanes verts ou des hybrides que des iguanes des Petites Antilles.
Le seul moyen de sauver l’espèce indigène est donc d’empêcher son envahisseur de l’atteindre et de se reproduire avec elle. Ainsi, l’Office National des Forêts organise tous les mois des expéditions pour prélever des iguanes communs, véritable espèce invasive, et les euthanasier.
Le crocodile de Cuba menacé par l’hybridation avec le crocodile américain
C’est également la situation que vit le crocodile de Cuba, espèce en danger critique d’extinction, dont la population aurait diminué de 80 % au cours du siècle dernier. L’introduction dans son écosystème d’autres espèces de sauriens a conduit à la dilution de son patrimoine génétique. Une étude de 2014 montrait que 49 % des crocodiles de Cuba à l’état sauvage présentaient des marqueurs génétiques d’autres espèces et notamment du caïman à lunettes et du crocodile américain avec lesquels il peut s’accoupler.
La conséquence pragmatique de cette importante hybridation est un changement de comportement chez le crocodile de Cuba. Si les individus purs privilégient les eaux douces et saumâtres, les hybrides ne sont pas rebutés par l’eau salée et s’aventurent là où jusqu’à présent on ne voyait pas de crocodile de Cuba. Autre changement : en captivité, où le patrimoine génétique de l’espèce est encore relativement préservé, les femelles construisent leur nid sur un monticule de terre pour protéger ses œufs de l’eau. Les hybrides, eux, font leurs œufs dans des trous qu’ils recouvrent ensuite.
Il semble difficile d’empêcher le croisement entre les espèces de sauriens. En 2016, un centre de reproduction en captivité de Cuba a réintroduit pour la première fois 100 crocodiles au patrimoine génétique pur. Quelques temps après, une bonne partie s’était reproduite avec des crocodiles américains.
Les dangereux pythons des Everglades
Dans le cas du crocodile de Cuba, c’est la captivité qui tente de préserver le génome de l’espèce sauvage. Mais un autre exemple de croisement entre reptiles, cette fois-ci dans les Everglades aux Etats-Unis, est plus inquiétant.
Des pythons auraient été hybridés en captivité puis réintroduits dans les marais du parc national situé au sud de la Floride. Il s’agirait d’un croisement entre python birman et python molure. Aucun des deux n’est présent naturellement sur le site, ils y ont été introduits par l’homme à cause de nombreux abandons, ce qui a eu un impact direct sur la faune indigène. Une étude de 2012 constatait en effet la disparition de 99 % des ratons-laveurs et des opossums par rapport aux années 1990. Mais en 2018, un nouveau cap a été franchi avec la découverte de serpents hybrides contenant des gènes des deux espèces. On ignore si l’hybridation s’est faite en milieu sauvage ou en captivité et que les individus ont été relâchés, mais les chercheurs penchent plutôt pour la seconde hypothèse.
Sauf que si la présence des deux reptiles était déjà un désastre pour l’écosystème des Everglades, la création d’un super hybride comportant des caractéristiques des deux en ferait un super prédateur presque impossible à éradiquer. Pour rappel, les Everglades font partie des sites naturels de l’Unesco menacés et classés sur la liste des patrimoines mondiaux en péril.
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