En forêt, dans les parcs et même dans les jardins, il n’est pas rare d’observer un écureuil courir le long d’un arbre. En France, il existe plusieurs espèces d’écureuils, mais seul l’écureuil roux est présent naturellement sur le territoire. L’espèce est d’ailleurs protégée depuis plusieurs années.
Description de l’écureuil roux
L’écureuil roux, ou Sciurus vulgaris de son nom scientifique, est une espèce de rongeur appartenant à la famille des Sciuridés. « C’est un lointain cousin de Scrat, de l’Age de Glace », s’amuse Sébastien Laguet, technicien forestier et membre des réseaux naturalistes mammifère et avifaune de l’Office National des Forêts (ONF).
Caractéristiques physiques
Bien qu’il porte le nom d’écureuil roux, son pelage peut arborer différentes teintes. « Cela nous vaut souvent des signalisations qui, en fait, sont bien des écureuils roux comme nous avons pu le vérifier. Il ne s’agit donc pas de sous-espèces mais de morphotypes différents », raconte Sébastien Laguet.
En effet, un écureuil roux peut avoir un pelage très foncé tirant sur le noir ou très clair. « Et toutes les palettes entre ces deux extrêmes », ajoute le technicien forestier.
D’après des études menées sur le terrain, il semblerait que l’altitude joue un rôle sur la couleur de l’écureuil roux. « Nous avons relevé qu’en milieu montagnard, les écureuils roux étaient davantage noirs. Cela peut s’expliquer par plusieurs facteurs : d’abord pour des raisons de climat, le noir gardant mieux la chaleur que les teintes claires, il s’agirait d’une adaptation thermique de l’écureuil à ces milieux plus froids. Et puis, pour des raisons de camouflage. Dans ces régions, les écureuils évoluent dans des résineux où le roux de leur pelage traditionnel contrasterait trop, ce qui les rendraient facilement repérables par des prédateurs tels que les rapaces. »
La partie ventrale, en revanche, est blanche, depuis le cou jusqu’au bas du ventre. Quant au corps de l’animal, il s’agit d’un rongeur de taille moyenne mesurant une vingtaine de centimètres et doté d’une queue de longueur quasi-équivalente. Adulte, il pèse 300 à 430 grammes en moyenne.
Sciurus vulgaris se distingue surtout par les pinceaux de poils qui surmontent ses deux oreilles, un peu comme chez le lynx, et qu’on « peut particulièrement observer en hiver », note Sébastien Laguet, la mue du printemps les faisant souvent se réduire.
Sa queue est également caractéristique et lui sert de balancier, pour garder l’équilibre lors de ses déplacements parfois rocambolesques à plusieurs mètres au-dessus du sol.
Régime alimentaire
L’écureuil roux a un régime alimentaire plutôt varié, mais principalement végétarien. Il se nourrit surtout de graines de différents arbres. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, il mange peu de glands pour la simple et bonne raison qu’il les digère mal. S’il en mange trop, il peut même en mourir.
« En revanche, il apprécie les graines des pins et des épicéas car elles restent dans leurs cônes durant 2 ans. L’écureuil n’a donc pas à descendre de l’arbre pour les manger et ne rivalise qu’avec certaines espèces d’oiseaux adaptées pour ouvrir ces cônes, comme le bec-croisé et le cassenoix. » Ces graines sont moins nutritives que celles des feuillus, dont il se nourrit également et qui lui rapportent plus d’énergie.
« L’écureuil roux mange aussi des fruits sauvages comme des merises (cerisiers sauvages), ainsi que des champignons qu’il cueille et fait sécher dans les arbres avant de les manger, du lichen et certaines fleurs. »
Dans des cas plus rares, et parce qu’il est opportuniste, l’écureuil peut aussi s’attaquer à un nid, soit pour les œufs, soit pour les oisillons.
Comportement
L’écureuil roux est un animal diurne, qui n’hiberne pas. « Bien entendu, par mauvais temps, il préférera rester à l’abri dans son nid, emmitouflé dans sa queue touffue pour se protéger du froid », explique Sébastien Laguet.
Le rongeur n’a d’ailleurs pas qu’un seul nid mais souvent une dizaine, pouvant être partagés entre plusieurs écureuils à différents moments. Ces nids sont construits dans les arbres, à l’aide de végétaux de toutes sortes. « Ils mesurent 20 à 30 cm de diamètre et possèdent une entrée sur le dessous et parfois une « sortie de secours » sur le dessus », continue le technicien forestier.
Non territoriaux, les mâles se répartissent cependant entre dominants et dominés, les premiers s’installant dans les meilleurs habitats, avec le plus de femelles et de disponibilités alimentaires (donc d’espèces d’arbres), et des altercations peuvent se produire à la saison des amours.
« Lorsque vous apercevez une course-poursuite entre deux écureuils, qui finissent souvent par monter spirale autour d’un arbre, il s’agit parfois de deux mâles, un dominant chassant un dominé pour l’empêcher de s’accoupler avec une femelle », explique Sébastien Laguet.
Très agile en l’air, ce rongeur se distingue par sa capacité à se déplacer avec aisance d’arbres en arbres, en faisant des bonds rapides et très impressionnants. L’écureuil de Pallas (« à ventre rouge »), espèce introduite en France et présente dans les Alpes-Maritimes et les Bouches-du-Rhône, n’est pas aussi habile. Il se déplace plus lentement dans les arbres et présente un gabarit plus trapu. On le reconnaît aussi à son ventre de couleur rouge-acajou et jaune clair, selon les individus.
Habitat
L’aire de répartition de l’écureuil roux est vaste : elle s’étend de l’Europe à l’Asie. On le trouve ainsi dans les pays européens – à l’exception des îles italiennes de la Sardaigne et de la Sicile, ainsi que du sud-ouest de la péninsule ibérique – jusqu’au Japon, en passant par la Russie, la Chine, etc.
« A noter qu’en Europe occidentale, l’écureuil roux est la seule espèce présente naturellement, alors qu’en Asie, en Amérique du Nord et dans l’hémisphère Sud, plusieurs espèces d’écureuils cohabitent souvent », complète Sébastien Laguet.
En France, Sciurus vulgaris est présent dans tout le territoire métropolitain. Il est en revanche absent de la Corse et de certaines îles atlantiques et méditerranéennes.
« C’est un animal essentiellement arboricole. Il arrive de le voir au sol, mais c’est lorsqu’il cherche des graines ou les enterre dans des cachettes pour y revenir plus tard. Cachettes dont il ne se rappelle pas toujours la localisation ou qui sont parfois pillées par un autre écureuil quand il a le dos tourné. »
L’écureuil roux a donc besoin d’arbres pour vivre. On peut aussi bien le trouver dans des milieux forestiers que dans des parcs urbains agrémentés d’arbres ou dans les jardins. Il affectionne les feuillus, les épicéas et autres pins qui lui fournissent la nourriture dont il a besoin.
Statut et menaces
Selon les critères de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), l’écureuil roux n’est pas considéré comme une espèce menacée à l’échelle internationale. L’organisme classe ce rongeur dans la catégorie « préoccupation mineure ». Néanmoins, il reconnaît également que les populations sauvages déclinent.
Espèce protégée en France
En France, l’écureuil était une espèce chassable jusque dans les années 1970. Il était consommé pour sa chair et sa fourrure servait à fabriquer des manteaux. Aujourd’hui, et depuis 1976, l’espèce est protégée.
Même s’il n’est pas considéré comme menacé sur le territoire, son aire de répartition est de plus en plus fragmentée et son habitat se dégrade quand la monoculture remplace les forêts mélangées dont il a besoin. Alors, des mesures de conservation sont prises pour empêcher sa disparition.
« En plus d’être la seule espèce d’écureuil autochtone en France, l’écureuil roux joue aussi un rôle important dans le renouvellement de la forêt, ajoute le technicien forestier. Il enterre si bien ses graines que lorsqu’il ne les retrouve pas, toutes les conditions pour une bonne germination sont réunies et les graines ainsi plantées donnent de nouveaux arbres. »
Espèces exotiques
Plusieurs espèces exotiques introduites par l’homme par accident ou intentionnellement – cas de particuliers qui relâchent par exemple des individus dans la nature – peuvent entrer en compétition avec l’écureuil roux ou le menacer indirectement.
L’écureuil de Pallas
Introduite dans les années 1960 dans les Alpes-Maritimes, cette espèce originaire d’Asie reconnaissable à son ventre rouge-acajou ou jaune clair et une silhouette plus trapue est une concurrente sérieuse de l’écureuil roux.
En effet, elle se reproduit vite et cause des dégâts importants dans les milieux avec l’écorçage des arbres et leur appétit vorace pour les fruits.
Egalement présent dans les Bouches-du-Rhône depuis les années 2000, l’écureuil de Pallas est désormais en passe d’être éradiqué pour éviter son expansion. D’après les données du Muséum National d’Histoire Naturelle (MNHN), en 2020, 371 écureuils de Pallas ont été observés en France.
L’écureuil gris
C’est probablement l’une des espèces les plus à risques pour l’écureuil roux aujourd’hui, et pour cause : l’écureuil gris a failli l’éradiquer complètement d’Angleterre. « Cette espèce est en effet porteur sain d’un virus qui, lorsqu’il est transmis à l’écureuil roux, est mortel », explique le technicien forestier.
Le « Squirrel Pox Virus » semble tuer 100 % des écureuils roux infectés, et ce, dans un laps de temps très court : 15 jours en moyenne. Les symptômes sont très violents, avec des ulcères cutanés formant des croûtes très visibles sur la tête et le corps de l’animal, et un état léthargique qui l’empêche de se nourrir convenablement.
Les écureuils gris introduits au Royaume-Uni étaient porteurs de ce virus, et on estime que c’est la principale cause du déclin de l’écureuil roux dans le pays. Sans les nombreux efforts de conservation qui ont été fournis, l’espèce aurait pu s’éteindre.
Pour l’instant, l’écureuil gris n’est à priori pas établi en France. Une population existe toutefois en Italie. « D’après les modélisations réalisées, ils devraient franchir les cols alpins et arriver en France et en Suisse aux alentours de 2020-2022 », détaille Sébastien Laguet. Les relevés du MNHN notent d’ailleurs la présence de 4 individus sur le territoire en 2020. « Heureusement, l’Italie a effectué des prélèvements et ces populations sont saines », donc à priori non porteuses du virus tueur d’écureuils roux.
L’écureuil roux d’Amérique
Plus récemment, l’écureuil roux d’Amérique (Tamiasciurus hudsonicus) a également été observé dans la nature sur le territoire français. La première identification de cette espèce exotique, détenue en captivité par des particuliers, remonte à octobre 2019 dans le département de la Manche. Il s’agissait d’un mâle. L’année suivante, une femelle et ses trois petits ont été aperçus, cette fois dans les Hautes-Pyrénées. A chaque fois, des agents de l’Office Français de la Biodiversité les ont capturés.
Ces individus provenaient probablement de particuliers qui les détenaient comme animaux de compagnie. Si la vente d’écureuils en animaleries n’est plus autorisée en France – et ce, quelle que soit l’espèce – elle reste tolérée sur Internet pour l’écureuil roux d’Amérique.
A noter que pour le distinguer de l’écureuil roux eurasien, il faut regarder le contour de son œil. Celui-ci est en effet cerclé de blanc, ce qui n’est pas le cas de Sciurus vulgaris. Il est aussi plus petit.
L’écureuil de Corée
Aussi appelé Tamia de Sibérie ou Tamias sibiricus de son nom scientifique, ce rongeur détenu comme animal de compagnie a été introduit dans la nature en France dans les années 1960. A l’époque, n’importe qui pouvait en acheter en animaleries. C’est désormais interdit, depuis 2016, notamment parce qu’il a été établi qu’il pouvait jouer un rôle dans la transmission de la maladie de Lyme à l’homme.
Aujourd’hui, plusieurs individus subsistent et se sont reproduits en milieu sauvage. Le gros des effectifs se trouve en Ile-de-France ainsi qu’en Picardie.
On le différencie facilement de l’écureuil roux par son physique : l’écureuil de Corée est en effet marron-gris et présente des rayures blanches sur le dos ainsi qu’autour de ses yeux. Autre différence de taille : il hiberne. En général, sa période d’hibernation dure d’octobre à mars. Il est surtout moins arboricole que l’écureuil roux.
Fragmentation du territoire et collisions routières
Les habitats de l’écureuil roux sont aujourd’hui fragmentés et dégradés, ce qui impacte les populations sauvages. Pour se déplacer d’un arbre à l’autre, il n’est pas rare qu’un individu traverse une route et se fasse faucher. La sensibilisation des automobilistes, la création de couloirs fauniques et la préservation des habitats sont donc des priorités.
« Même s’il ne s’agit pas vraiment d’une espèce menacée – la population est tout de même cyclique –, nous devons prêter attention aux écureuils roux dans notre gestion de la forêt. Mais ce n’est pas toujours évident de repérer leurs nids dans les arbres », complète le technicien de l’ONF.
Reproduction
Selon les années et la nourriture disponible, il peut exister deux pics de mises bas chez l’écureuil roux : le premier de février à avril et entre mai et août. « Si l’automne a été bon, avec de la nourriture en abondance, les femelles peuvent commencer à s’accoupler rapidement en hiver. Une fois les petits sevrés, elles peuvent se reproduire à nouveau dans l’année, à condition d’avoir pu reconstituer leurs réserves. »
Après une gestation qui dure entre 38 et 40 jours, une femelle peut donc avoir deux portées par an avec, en moyenne, 3 à 5 petits par portée. A noter qu’une même portée peut avoir deux pères différents, si la femelle s’est fait féconder par deux mâles à un intervalle court (dans la même journée).
« Lorsqu’ils naissent, les petits sont nus, aveugles et sourds. Ils sont donc très dépendants du nid et de leur mère. Ils n’en sortent que 45 jours après leur naissance, et seront sevrés vers l’âge de 10 à 12 semaines. »
Jusqu’à ce moment, la mère les protège des prédateurs comme la martre, l’épervier ou la fouine en les déplaçant selon besoin dans un autre nid si elle sent un danger. Après leur avoir montré comment se nourrir, la femelle les pousse à quitter son domaine vital. Dans la nature, l’espérance de vie d’un écureuil roux est de 5 à 6 ans, et jusqu’à 12 ans en captivité. La maturité sexuelle est atteinte aux alentours de 1 an.
[Merci à Sébastien Laguet et à la SFEPM pour ces informations. Pour aller plus loin, consultez le site du Muséum National d’Histoire Naturelle.]
NB : si vous apercevez un écureuil, signalez-le ! Ces observations permettent de compléter les données déjà collectées par les scientifiques et ainsi d’en apprendre plus sur l’espèce en France, mais aussi sur la répartition des espèces d’écureuils exotiques. Pour participer, c’est par ici : https://ecureuils.mnhn.fr/enquete-nationale/.
6 Réponses to “L’écureuil roux”
09.06.2023
CATTANEOVos informations sont très intéressantes mais dans notre parc les écureuils agés semblent disparaitre et seuls quelques jeunes sont présents. On ne sait pas pourquoi ?
Cela fait 2 ans que les pignes de pins d’Alep ne donne pas de nouvelles pignes et on est obligé de les nourrir avec des graines de tournesol et des noix.
On essaye de savoir les solutions trouvées par les écureuils mais à part de passer de jardin en jardin pour manger on n’a pas d’infos.
Les pies sont nombreuses et intelligentes, elles se liguent pour cerner un écureuil s’il attaque un nid, c’est souvent sa mort.
Les chats sont aussi très néfastes et on en a retrouvé 2 avec un jeune écureuil dans la bouche, on a réussi à les sauver avec la LPO.
Un rapace tournoie au dessus du parc mais on ne l’a pas vu attaqué encore.
Une autre cause est les routes, c’est une cause très importante, la solution écuroduc est trop couteuse et trop dure à mettre en place aux endroits de passage.
Vous pouvez nous contacer par mail
sos.ecureuil.provence@gmail.com
30.05.2022
Annamerci pour ces infos – nous habitons en zone forestiere – ce que les ecureuils roux semblent aprecier est une assiette remplie d’eau fraiche renoulelee toutes les 48h – au pied d’un tronc pour qu’ils puissent se mettre vite a l’abri en cas de menace – c’est un defile permanent d’animaux sauvages surtout en periode de secheresse et un regal pour les yeux…
11.10.2021
HirchwaldMerci de ces informations complétant très bien le site du MNHN sur l’écureuil.
Ce dernier indique comment l’observer.
Pouvez-vous préciser encore plus ?
A l’avance, merci.
PS Observer, pas capturer, ou bien photographier !
24.06.2021
BITTERLINArticle très sympa et intéressant ! Merci ! (j’adore ces petites boules de poils !)