Il est dodu, recouvert de piquants et arbore une bouille adorable… Le hérisson est probablement l’un des petits mammifères présents en France les plus prisés sur les réseaux sociaux. Et pour cause, bon nombre de personnes en croisent dans leurs jardins comme sur les routes, et sollicitent souvent les avis des internautes pour leur venir en aide, lorsqu’ils les pensent en danger. D’ailleurs, nous avions consacré un article dédié à la marche à suivre quand on trouve un hérisson. Un engouement qui suscite beaucoup de sympathie autour de cet animal, mais qui véhicule également pas mal d’idées reçues. Apprenons à mieux le connaître.
Description du hérisson d’Europe
Le hérisson d’Europe – ou Erinaceus europaeus de son nom scientifique – est un petit mammifère plutôt courant en France. Il est un cousin du :
- hérisson à poitrine blanche du Nord (Erinaceus roumanicus), vivant dans la partie orientale de l’Europe jusqu’en Russie et au Kazakhstan ;
- hérisson à poitrine blanche du Sud (Erinaceus concolor), présent de la Gérogie à la Jordanie en passant par la Turquie ;
- hérisson de l’Amour (Erinaceus amurensis), originaire de la pointe Est de la Russie et de la Chine, ainsi qu’en Corée.
Pendant un temps, on a pensé que le hérisson d’Europe et ses cousins à poitrine blanche pouvaient former une seule et même espèce. Il faut dire que la distinction n’est pas toujours évidentes, d’autant qu’on rapporte des cas d’hybridation dans les régions où vivent naturellement les deux espèces.
Il existe également des espèces de hérissons en Afrique, mais aucune en Amérique ni en Australie.
Caractéristiques physiques
Notre hérisson d’Europe est facilement reconnaissable de n’importe quel autre mammifère présent en France grâce, bien entendu, à ses piquants. Ils recouvrent tout le dessus de l’animal et sont généralement brun très clair à la base et à l’extrémité, et brun foncé entre les deux. Les piquants font partie du hérisson dès sa naissance : bien qu’ils soient sous la peau pour ne pas blesser la mère lors de la mise bas, ils sortent quelques minutes après la venue au monde.
Adulte, un hérisson présente 5.000 à 7.000 piquants sur la tête et le dos, tandis que le dessous du corps et les pattes sont recouverts de poils classiques de couleur sombre. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, les piquants du hérisson ne sont pas des épines mais des poils agglutinés qui se renouvellent tous les 18 mois environ.
Ses pattes sont courtes et, surmontées de ce corps rondouillard, elle donne au hérisson une allure légèrement pataude lorsqu’il se déplace. A leur extrémité, elles sont dotées de griffes qui lui permettent de creuser le sol à la recherche de nourriture ou d’un endroit tranquille où se reposer.
Ses yeux sont petits et semblables à deux petites billes noires. La vue du hérisson n’étant pas très bonne, ils n’ont guère besoin de prendre plus de place ! Ce petit mammifère préfère en effet utiliser l’ouïe et l’odorat, qu’il a surdéveloppés, pour sa vie quotidienne. Pour se repérer dans l’espace, il se sert également de ses poils latéraux et de ses moustaches, de part et d’autre de son petit museau.
Côté gabarit, le poids du hérisson varie selon la période de l’année : à l’approche de l’hiver, il fait des réserves et peut atteindre jusqu’à 1,5 kg. Mais le reste de l’année, le hérisson affiche plutôt un poids compris entre 600 à 1300 grammes, sans différence entre mâles et femelles. Le tout pour une taille moyenne d’environ 25 à 30 cm de long, sans compter la queue qui n’est de toute façon pas très visible avec ses 2 à 3 cm de long.
Que mange le hérisson ?
Le hérisson est un insectivore, comme la taupe et la musaraigne. Il est donc principalement carnivore et se nourrit surtout de vers, de perce-oreilles, de coléoptères, de criquets, de grillons et autres insectes, ainsi que de leurs larves.
Il se satisfait également de cloportes, de scolopendres, d’araignées et de mille-pattes, ainsi que de limaces et d’escargots. En cela, le hérisson est un précieux allié des jardiniers, car il débarrasse naturellement les potagers de toutes ces menaces.
Opportuniste, le hérisson peut parfois, si l’occasion se présente, s’attaquer à des œufs ou des oisillons. Mais dans la réalité, il peut difficilement atteindre des nids pour les piller. Idem, la crainte de ceux qui possèdent des poulaillers n’est guère fondée car les œufs de poules sont bien trop gros pour leur gueule.
A noter que grâce à son insensibilité aux piqûres, le hérisson peut également se nourrir de guêpes s’il en a l’opportunité.
Comportement
Le hérisson est un animal crépusculaire et nocturne, qui vit et se nourrit à la tombée du jour et la nuit. Il n’est donc généralement pas de bonne augure d’en croiser un en plein jour, bien que cela ne veuille pas forcément dire que l’animal est en danger ! Pour cela, il faut observer le comportement de l’individu : semble-t-il désorienté ? Est-il amaigri ? Est-il recouvert de mouches et de parasites ? Si non, le hérisson peut n’être que de passage et toute intervention de votre part pourrait lui nuire.
Idem, il n’est pas habituel d’apercevoir un hérisson en hiver, pour la simple et bonne raison qu’il s’agit d’un animal qui hiberne. En automne, il se constitue des réserves de graisse qui lui permettront de tenir durant les longs mois d’hiver, où la nourriture manque. Sa température corporelle diminue en-dessous des 10°C et son rythme cardiaque ralentit, ce qui lui permet d’économiser ses forces et de consommer moins d’énergie. A noter que pour qu’un hérisson ait une chance de survivre à l’hiver, il doit peser 600 grammes minimum. Sa période d’hibernation peut s’étendre d’octobre à mars.
Mais attention, cela ne signifie pas pour autant que voir un hérisson en hiver n’est pas normal. Il peut en effet avoir des phases de réveil, comme il se peut que certains individus n’hibernent pas. Tout dépend en grande partie des températures : les hivers plus doux qu’à l’accoutumée verront plus de hérissons actifs. L’hibernation varie aussi selon les régions et les individus.
Habitat
Comme son nom le laisse entendre, le hérisson d’Europe est endémique du continent européen, jusque dans la partie occidentale de la Russie. On le trouve même dans la plupart des îles méditerranéennes et aux Açores, archipel portugais au milieu de l’océan Atlantique.
En France, le hérisson est présent quasiment partout, jusqu’en altitude puisqu’on l’a observé jusqu’à 2000 m d’altitude dans les Alpes.
Pas difficile, ce petit mammifère recouvert de piquants vit dans différents types de milieux. Il lui suffit simplement de trouver de quoi se loger et de quoi se nourrir. On le trouve plus couramment dans les jardins – à condition qu’ils ne soient pas trop entretenus avec un gazon tondu à ras toute l’année –, les espaces tampons entre zones boisées et cultures, mais également les lieux de bocage.
En revanche, il n’apprécie pas les espaces agricoles intensifs, ni les monocultures de résineux. Le hérisson affectionne les milieux ouverts, tant qu’il peut s’abriter dans un buisson, un tas de bois ou de feuilles mortes ou autre abri de fortune.
Un hérisson est généralement assez attaché à son territoire. Tant qu’il a de la nourriture, un abri et éventuellement un partenaire pour s’accoupler, il ne quittera pas son foyer. En revanche, si l’une de ces composantes venaient à manquer, il est capable de quitter son chez lui pour trouver un meilleur espace. Mais attention, ce déménagement en quête d’un meilleur domaine vital n’est pas sans risque, car le hérisson peut traverser des routes très dangereuses ou manquer de nourriture en chemin.
Statut et menaces
D’après la dernière évaluation de l’espèce par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), Erinaceus europaeus n’est pas menacé. L’espèce est en effet classée « peu concernée » par l’extinction, mais cette évaluation remonte à 2016 et porte sur l’aire de répartition globale du hérisson d’Europe. En Grande-Bretagne, par exemple, le hérisson a été inscrit sur la liste rouge des espèces en danger en 2020.
Espèce protégée
En France, le hérisson est protégé depuis un arrêté ministériel de 1981, puis par l’arrêté du 23 avril 2007 établissant la liste des mammifères terrestres protégés sur l’ensemble du territoire. C’est le cas également dans toute l’Union européenne.
Il est donc interdit de le capturer, de le tuer, de le blesser ou de le vendre. Il est également interdit de le déplacer, ce qui n’est pas forcément su par tout le monde. Aussi, si vous croisez un hérisson dans votre jardin ou en balade, il est strictement interdit de le prendre avec vous et de le transporter jusqu’à un autre lieu. Officiellement, même s’il semble malade. Dans ce cas, vous devez vous rapprocher d’un centre de soin de la faune sauvage qui vous indiquera la marche à suivre.
Si l’espèce est protégée dans l’Hexagone, on ignore en revanche beaucoup de choses quant à sa situation. Dans une récente pétition lancée par des associations et des centres de soins qui sauvent des hérissons blessés, les hérissons seraient menacés en France et leur déclin serait inquiétant.
« Depuis les années 1950, les populations de hérissons sont passées d’environ trente millions à moins d’un million à cause de l’agriculture chimique industrielle. Là où dans les campagnes il y avait 100 hérissons, il n’y en a plus que 3 à présent ! […] Bien qu’aucune étude sérieuse n’ait été menée en France, on estime que l’espèce sera quasiment éteinte en 2025, avec des territoires d’où il aura totalement disparu, et d’autres avec des effectifs si réduits qu’ils ne seront plus en mesure de se reproduire, et donc condamnés à disparaître », écrivent-ils.
Collisions routières
L’une des principales menaces qui pèsent sur le hérisson en France, c’est le trafic routier. Qui n’a jamais vu un hérisson écrasé sur le bord de la route ? Il faut dire que ces accidents sont extrêmement fréquents.
D’après la Société française pour l’étude et la protection des mammifères (SFEPM), entre 1 et 3 millions de hérissons seraient tués tous les ans sur les routes françaises, avec une moyenne située probablement aux alentours de 1,8 million de décès. Une mortalité qui ne cesserait d’augmenter avec l’augmentation du trafic routier et le développement du réseau des routes.
Malheureusement, la principale défense du hérisson en cas de danger, c’est de se mettre en boule pour ne laisser à ses assaillants qu’une armure de piquants. Une tactique qui fait ses preuves la plupart du temps, mais s’avère mortelle sur la route.
Dégradation du milieu naturel
Comme évoqué dans le paragraphe sur l’habitat du hérisson, cet animal aime les espaces ouverts, naturels et diversifiés où la biodiversité abonde, pour lui permettre de trouver de quoi se nourrir. Il n’aime pas les espaces aseptisés, trop entretenus et où se développe l’agriculture intensive.
Avec l’essor de ces pratiques agricoles et l’étalement urbain, les habitats potentiels pour les hérissons se sont donc réduits comme peau de chagrin. Même les jardins, qui pouvaient leur offrir un abri intéressant, sont aujourd’hui trop entretenus : l’herbe est tondue, les haies sont rasées et les feuilles mortes ramassées. Avec, à chaque coup de tondeuse et de débroussailleuse, un risque de tuer un hérisson tapi là. Rien n’est laissé pour qu’il puisse se trouver un endroit où s’établir en toute sécurité et passer l’hiver.
La conséquence, c’est que les hérissons sont davantage poussés à quitter les lieux où ils vivaient habituellement pour tenter d’en trouver des plus accueillants. Mais pendant leur voyage – lorsqu’ils ne sont pas bloqués par des clôtures infranchissables –, ils se confrontent au risque de traverser des routes… et de rencontrer des voitures.
Pesticides
Comme évoqué plus haut, le hérisson se nourrit de limaces, d’escargot, de vers et autres invertébrés dont souhaite généralement se débarrasser le jardinier. Quitte à recourir à des produits chimiques dangereux…
L’utilisation massive de pesticides et autres biocides chimiques a non seulement fait disparaître des proies potentielles pour le hérisson, mais a pu aussi le contaminer indirectement.
Prédateurs et parasites
Dans un écosystème équilibré, les prédateurs naturels se sont pas considérés comme une menace pour une espèce et ne peuvent expliquer son déclin. C’est le cas pour le hérisson qui, en plus, n’a que très peu de prédateurs naturels du fait de son bouclier de piquants qui lui offre une défense plus que dissuasive.
Il arrive cependant que des juvéniles soient plus embêtés, ou que des prédateurs plus tenaces que d’autres finissent par venir à bout du hérisson. Ce sont généralement des putois, des renards, des hiboux grand-duc et des chiens.
Si elle lui offre une protection bienvenue contre les prédateurs, son armure de piquants l’empêche, en revanche, de faire sa toilette régulièrement. Résultat, le corps du hérisson est un terrain de jeu inégalable pour toutes sortes de parasites, puces et tiques en tête.
Un hérisson en bonne santé parvient généralement à survivre à ces infestations, sans dommage. En revanche, s’il est faible, blessé et mal nourri, il est beaucoup plus exposé aux risques de maladies liées à ces parasites.
Reproduction
Dès sa sortie d’hibernation, au mois de mars, le hérisson se met en quête d’un partenaire pour s’accoupler. Une recherche qui peut s’étendre jusqu’au mois d’août, puisque plusieurs accouplements sont possibles durant la période.
Lorsqu’ils se trouvent, mâle et femelle entament une sorte de parade nuptiale durant laquelle les deux individus semblent se jauger à distance. Puis, lorsque la femelle décide qu’il est temps de passer à l’étape suivante, elle se cambre et rabat ses piquants pour permettre au mâle de lui grimper dessus sans se blesser.
Une fois l’accouplement terminé, le couple se sépare et part faire sa vie chacun de son côté. Le mâle part à la recherche de nouvelles partenaires, tout comme la femelle qui peut avoir cinq à six prétendants différents au cours d’une même saison des amours. Une fois fécondée, elle se trouve un endroit tranquille et y fabrique un nid.
Une femelle a généralement une seule portée par an, mais peut aussi en avoir deux. La gestation dure 35 à 40 jours. Chaque portée se compose de 2 à 10 petits, avec une moyenne plutôt comprise entre 4 et 6 petits.
Ces derniers sont très fragiles à la naissance : ils sont aveugles, sourds et donc très dépendants de leur mère et de la sécurité du nid qu’elle leur a construit. Ce n’est qu’après quelques jours qu’ils entendent pour la première fois, et vers l’âge de 14 à 18 jours qu’ils ouvrent les yeux. Attention, si vous avez un nid de hérissons dans votre jardin, n’allez surtout pas les déranger ! Une mère stressée par votre présence peut abandonner ses petits, voire dans certains cas, les manger !
Dès trois semaines après leur naissance, les bébés hérissons sont capables d’accompagner leur mère en sortie et ainsi de se confronter au monde. Ils allaiteront jusqu’à l’âge de six semaines, tout en introduisant progressivement des proies à leur régime alimentaire. Le sevrage a lieu vers l’âge de deux mois, lorsque les hérissons atteignent le poids de 200 à 250 grammes.
Aller plus loin
- « Le hérisson d’Europe », Philippe Jourde, 2020 ;
- « Le hérisson d’Europe, un patrimoine commun en danger », Christian-Philippe Arthur, Courrier de la nature, 2016 ;
- Guide « Accueillir le hérisson au jardin », LPO, 2020.
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