
Les pieuvres sont des animaux extraordinaires et mystérieux. Présents dans de nombreuses légendes marines – tout le monde a par exemple entendu parler du Kraken ou poulpe géant – ces animaux marins présentent surtout d’incroyables facultés.
Une anatomie atypique
Il existe un peu plus de 300 espèces de pieuvres dans le monde. Ces octopodes – animaux dotés de huit bras – peuvent mesurer de quelques centimètres jusqu’à plusieurs mètres de long selon les espèces et vivent dans les océans du monde entier.
Les trois cœurs des pieuvres
Ces animaux marins présentent de nombreuses caractéristiques physiques qui en font des êtres tout à fait uniques dans le règne animal. Tout d’abord, les pieuvres ont trois cœurs : un cœur principal – aussi appelé « cœur systémique » – et deux cœurs plus petits appelés « cœurs branchiaux ». Ces derniers sont reliés au cœur principal et ont pour rôle de pomper le sang chargé en dioxygène via les branchies.
Les cerveaux des pieuvres
On dit également que les pieuvres sont dotées de neuf cerveaux. En réalité, ce n’est pas tout à fait exact : les pieuvres ont un cerveau principal et huit systèmes nerveux indépendants les uns des autres situés dans chacun de leurs huit bras. Chaque système fonctionne de façon autonome. C’est la raison pour laquelle leurs déplacements sont si atypiques : lorsqu’une pieuvre rampe dans les fonds marins, on dirait que chaque bras part dans un sens sans se soucier des autres, bien que le rendu global soit tout à fait cohérent !
Du sang bleu
Autre particularité tout à fait étonnante : les pieuvres ont le sang bleu. En fait, ce ne sont pas les seuls animaux à avoir le sang bleu et l’explication est finalement plutôt simple.
Chez les poulpes comme chez d’autres invertébrés dits primitifs, c’est-à-dire qui n’ont pas beaucoup évolué depuis des dizaines de milliers d’années, la protéine utilisée pour transporter l’oxygène dans le sang dans le corps n’est pas l’hémoglobine mais l’hémocyanine. Celle-ci s’appuie sur le cuivre et non sur le fer comme chez les animaux à sang rouge. Or, la combinaison cuivre-dioxygène donne une coloration bleutée, tandis que celle fer-dioxygène donne du rouge.
C’est grâce à cette particularité que les pieuvres peuvent survivre dans des eaux aux températures aussi variées que les eaux tropicales ou polaires, de -1,8 °C à 30 °C. D’après une étude de l’Alfred Wegener Institute for Polar and Marine Research, l’hémocyanine présente dans leur sang est d’une plus grande efficacité pour libérer l’oxygène dans les tissus que l’hémoglobine lorsque les températures sont très froides.
L’espérance de vie d’une pieuvre n’est pas très longue (généralement moins de 5 ans et même moins d’1 an chez certaines espèces), ce qui les empêche d’entamer de longues migrations pour se trouver un nouvel habitat lorsque le leur devient inhospitalier. L’hémocyanine leur permet ainsi de s’adapter.
Des techniques de défense pointues
Les pieuvres sont des animaux plutôt nocturnes. Dotées d’une excellente vision, elles attendent la nuit pour chasser poissons, crustacés et mollusques. La journée, en revanche, elles préfèrent rester cachées dans des cavités rocheuses ou se fondre dans le paysage pour échapper à leurs prédateurs comme le mérou goliath par exemple.
Ces octopodes sont extrêmement douées pour se camoufler et ainsi passer inaperçues. Quelques fractions de secondes leur suffisent pour changer de couleur et de forme et ainsi devenir invisibles. Un exploit rendu possible par les chromatophores, des cellules pigmentaires responsables du changement de couleur présentes dans son épiderme. D’autres cellules pigmentaires entrent également en action : les iridophores et les leucophores qui, quant à elles, réfléchissent la lumière.
Certaines espèces utilisent également des techniques de défense dissuasives. La pieuvre mimétique (Thaumoctopus mimicus), par exemple, est capable d’imiter un grand nombre d’animaux pour tromper ses prédateurs. La pieuvre à anneaux bleus (Hapalochlaena maculosa), quant à elle, utilise l’aposématisme : en d’autres termes, elle avertit ses prédateurs de sa toxicité grâce à ses anneaux bleu vif.
Une intelligence sur-développée
Les pieuvres appartiennent au même groupe que les calamars et les seiches : ce sont des céphalopodes coléoïdes. Tous ces invertébrés partagent plusieurs points communs, et notamment celui d’avoir une intelligence supérieure à d’autres espèces d’invertébrés. Ils sont par exemple capables d’ouvrir des bocaux, de communiquer entre eux via un code qui leur est propre ou encore d’apprendre. Autant de capacités exceptionnelles dues, en partie, à des propriétés génétiques qui leur sont propres.
Et cela va plus loin. Non seulement ces octopodes font preuve d’une intelligence remarquable, mais en plus ils ont besoin d’être stimulés intellectuellement. Dans un environnement dénué de toute nouveauté et de diversité, comme cela peut par exemple arriver en captivité, les pieuvres adoptent un comportement autodestructeur et peuvent aller jusqu’à manger leurs propres tentacules. On parle alors d’autophagie.
par Jennifer Matas
1 réponse to “Les pieuvres, des animaux méconnus aux facultés incroyables”
07.10.2023
Muller YvesUn article sur les pieuvres vient se sortir dans la revue Pour la Science d’octobre 2023.