La tortue d’Egypte, aussi appelée tortue de Kleinmann, est en danger critique d’extinction depuis 2003, date de la dernière étude publiée sur l’espèce. Estimée à 55 600 tortues il y a 30 ans, la population actuelle de Testudo Kleinmanni compte environ 7 470 individus, dont 5 000 en âge de se reproduire. Si le déclin continue à cette vitesse, l’espèce pourrait être déclarée éteinte dans moins de 20 ans.
La tortue d’Egypte est la plus petite de tout le genre Testudo qui compte cinq espèces dont la tortue d’Hermann et la tortue grecque. La femelle est plus grande que le mâle avec respectivement 127 mm et 95 mm de long. Un dimorphisme sexuel permet de reconnaître chaque sexe. En effet, le corps du mâle s’achève par une longue queue alors que celle de la femelle est courte. En revanche, chez les deux sexes, la carapace arbore une couleur jaune dorée dont chaque écaille est bordée d’un trait noir épais. Le plastron (la carapace sous la tortue) est caractéristique de l’espèce : un « V » s’y dessine grâce à une ou deux taches de couleur marron ou noir.
Les tortues d’Egypte sont entièrement végétariennes. Elles s’alimentent donc d’herbes, de feuilles et de fleurs. A l’état sauvage, comme elles vivent le long des côtes, elles privilégient la salicorne et la lavande de mer aussi appelée lilas de mer.
Localisation
Malgré son nom évocateur, de nos jours, la tortue d’Egypte vit principalement en Libye, au nord du continent africain. Son aire de répartition historique dessine une bande de 100 km de large le long des côtes partant de Libye, traversant l’Egypte, jusqu’en Israël. Seulement voilà, la tortue d’Egypte pourrait être éteinte dans le pays du même nom ! En 2001, deux tortues ont été aperçues dans le pays, une première depuis 20 ans. La réserve naturelle de Zaranik, dans le nord du Sinaï, semble abriter la dernière population sauvage viable d’Egypte. Il existe des tortues proches physiquement de Testudo Kleinmanni en Israël également mais, a priori, il s’agirait d’une espèce distincte. Pour la population de Zaranik, un doute subsiste encore.
L’habitat naturel de cette petite tortue est le sable et le sol caillouteux des étendues désertiques ou semi-désertiques. Comme pour beaucoup de reptiles, le taux d’humidité de son milieu est important car elle ne boit presque jamais.
Les tortues d’Egypte s’enfouissent dans un terrier durant les heures les plus chaudes de la journée et s’activent en début et fin de journée pour trouver à manger.
Menaces
La perte de son habitat
Comme de plus en plus souvent, l’une des principales menaces qui pèse sur cette espèce est la destruction de son habitat. C’est d’ailleurs en partie ce qui explique sa quasi-disparition d’Egypte où le littoral est de plus en plus dégradé. En effet, de nos jours rares sont les terres sableuses proches de la mer Méditerranée où ne se multiplient pas les quartiers résidentiels ou constructions pour le tourisme. En plus de cette urbanisation, l’expansion de l’agriculture concurrence également l’habitat de la tortue d’Egypte. Si les zones ne deviennent pas des champs de culture, elles servent au pâturage du bétail. Ainsi, les arbustes et buissons aux pieds desquels les tortues recherchent la fraîcheur dans la journée disparaissent. Le pâturage entraîne aussi la raréfaction de la nourriture des tortues de Kleinmann puisque, rappelons-le, il s’agit de reptiles végétariens.
D’après l’UICN, l’aire de répartition historique de cette espèce mesurait 123 610 km². Aujourd’hui, elle n’occupe plus que de 16 600 km².
Expulsés des zones côtières, les tortues d’Egypte s’aventurent davantage dans les terres où les conditions d’humidité ne suffisent malheureusement pas à leur survie. Toutefois, cela explique qu’en Libye des spécimens aient été trouvés dans des marais salés.
Le marché des animaux de compagnie
L’autre cause de déclin des tortues d’Egypte est son succès comme animal domestique. Petites et jolies, ces tortues sont très prisées par les particuliers. Par conséquent, la collecte en milieu sauvage est une pratique qui s’est répandue jusqu’à atteindre son apogée entre les années 1980 et 1990. Après avoir épuisé les stocks de populations égyptiennes, le commerce illégal s’est attaqué aux populations de Libye. Les locaux prélèvent les tortues et les revendent pour une misère à des trafiquants qui les envoient aux Etats-Unis, en Europe et en Asie.
Même si son commerce est interdit, il suffit de taper le nom du reptile sur votre moteur de recherche pour tomber sur des particuliers qui en possèdent, des forums de conseils ou des vidéos montrant des individus en captivité. On estime qu’actuellement il existe bien plus de tortues d’Egypte en captivité qu’en milieu naturel.
« Au cours des cinq dernières années, des centaines, peut-être des milliers, de tortues égyptiennes (Testudo kleinmanni) ont été exportées du Caire vers les États-Unis. Beaucoup de ces captives ne s’en sortent pas, mourant après seulement quelques semaines ou quelques mois en captivité. On espère que l’exploitation commerciale de cette espèce cessera bientôt », pouvait-on lire dans le numéro de janvier 1993 de Totuga Gazette, un club californien de fans de tortues.
Efforts de conservation
A l’heure actuelle, la population mondiale sauvage de tortues d’Egypte va s’éteindre dans moins de 20 ans si rien n’est fait. Une réalité que commencent à comprendre les autorités. L’année 1994 marque un tournant dans la protection des tortues d’Egypte.
C’est en effet cette année-là que la CITES vote le passage de Testudo Kleinmanni de l’annexe II à l’annexe I. Depuis cette date, le commerce de cette espèce est donc interdit, excepté dans un but scientifique. La même année, l’Egypte légifère également pour sauver l’animal mais la loi « baha ek din » est loin d’être toujours appliquée. Pour le moment, seule la Libye ne protège pas encore légalement le reptile.
L’espoir pourrait venir de la réintroduction en milieu naturel de spécimens élevés en captivité. Le programme de conservation « Tortoise care » est dédié à cette petite tortue. Mis en place par Sherif et Mindy El Din alors qu’on leur confiait la réintroduction de pas moins de 200 individus en mauvaise santé détenus illégalement, ce projet est devenu le programme de référence pour la tortue d’Egypte. Il lutte pour sa protection et sa réintroduction dans la réserve de Zaranik où vivrait la dernière population d’Egypte. Pour les aider dans cette opération, les Egyptiens peuvent compter sur la Société Zoologique de Londres qui est l’un des partenaires principaux de Tortoise Care. L’institution a notamment acheté du matériel de suivi radio et supervise les réintroductions qui ont débuté en 1998.
Cependant, une dernière menace inquiète les scientifiques : le croisement génétique. Les tortues d’Egypte qui vivent en Libye et les tortues du Sinaï ne viennent pas de la même sous-espèce et la reproduction entre deux individus de sous-espèces différentes aboutit toujours à l’hybridation génétique. Dans ces conditions, les réintroductions sont très étroitement surveillées.
Reproduction des tortues d’Egypte
Les tortues d’Egypte sont solitaires, mâles et femelles ne se rencontrent que durant la période de reproduction qui démarre alors que les températures estivales commencent à baisser, en septembre. Alors que le genre Testudo est connu pour avoir un accouplement assez agressif (le mâle mord les pattes de la femelle pour l’empêcher de bouger), ce comportement n’a pas été observé sur la tortue d’Egypte. En revanche, le mâle Testudo Kleinmanni est très bruyant pendant la reproduction, ses vocalises sont comparées à celles des colombes ! L’accouplement en lui-même est assez long et dure souvent plus de 20 minutes.
La saison de la ponte débute à partir de mai pour s’achever à la fin de l’été. La femelle choisit le pied d’un arbre ou une souche pour pondre ses œufs à l’ombre. La tortue creuse dans le sable à plusieurs centimètres de profondeur afin de pondre. Elle renouvelle l’opération plusieurs fois et pond 1 à 4 œufs simultanément, chaque ponte étant espacée d’environ un mois. La période d’incubation des œufs est de 3 à 4 mois.
Les tortues d’Egypte possèdent une longévité assez importante, comparable à celle de l’Homme, soit entre 70 et 100 ans. Contrairement à beaucoup d’espèces, la maturité sexuelle n’est pas une question d’âge mais une question de taille du plastron ! Leur maturité sexuelle doit donc se situer entre 10 et 15 ans.
2 Réponses to “La tortue d’Egypte”
27.02.2022
Felea IoanaOui Anne-Sophie je pense qu’il faut la rentrer c’est un animal à sang froid des pays chauds elle a besoins de chaleur. Elle passe sa vie sur le sable chaud 🙂
cordialement
26.11.2021
Anne-Sophie RuelloOn m’a « donné » une tortue d’Egypte, apparemment « tombée » (?) d’un balcon
Actuellement elle hiberne sur la terrasse sous un tas de feuilles, mais j’ai peur qu’il fasse trop froid pour elle; dois-je la rentrer à l’intérieur ?
Merci de vos conseils
Anne-Sophie